Entre le 11 et le 16 juillet 1995, à Srebrenica, 8 372 hommes et adolescents musulmans ont été massacrés lors du pire génocide en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. 30 ans plus tard, cette tragédie continue de hanter la mauvaise conscience du monde occidentale, silencieuse au moment des faits. Aujourd’hui, le génocide israélien à Gaza ravive les mémoires coupables.
Le 11 juillet 1995, les forces serbes de Bosnie entraient dans la ville de Srebrenica avant d’y massacrer plus de 8 000 hommes et adolescents musulmans. Trente ans plus tard, ce génocide survenu durant la guerre de Bosnie-Herzégovine continue de marquer profondément les survivants et les familles des victimes.
Un massacre sous les yeux des casques bleus
Dans la nuit du 12 au 13 juillet 1995, Srebrenica, petite ville thermale de l’est de la Bosnie, devenait le théâtre du dernier génocide perpétré en Europe au XXe siècle. Plus de 8 000 Bosniaques y furent exécutés sous les yeux de 450 casques bleus néerlandais. Aujourd’hui, cette localité, réduite à quelque 800 habitants – contre 6 000 avant-guerre – reste à jamais marquée par le souvenir de ce crime majeur. Elle est peuplée à 60 % de Bosniaques et 40 % de Serbes.
Des milliers de personnes sont attendues ce vendredi à Srebrenica pour les commémorations. La veille, des milliers de « marcheurs de la paix de Srebrenica », ayant parcouru plus de 100 km en mémoire des victimes, sont arrivés au centre commémoratif de Srebrenica-Potocari.
Srebrenica fut l’épisode le plus sanglant du conflit intercommunautaire bosnien (1992-1995), déclenché après l’indépendance de la Bosnie, soutenue par les Bosniaques (musulmans) et les Croates (catholiques), mais rejetée par les Serbes (orthodoxes). L’enclave de Srebrenica, pourtant déclarée « zone protégée » par l’ONU, fut attaquée en juillet 1995 par les forces du général Ratko Mladic.
« Une génération entière a été perdue »
« Depuis trente ans, nous portons la douleur dans nos âmes. Nos enfants ont été tués innocents dans la zone protégée de l’ONU. L’Europe et le monde ont observé, muets, la tuerie de nos enfants », dénonce Munira Subasic, présidente de l’association des mères de Srebrenica, dont le mari Hilmo et le fils Nermin, 17 ans, ont été assassinés.
Les anciens chefs des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, ont été condamnés à perpétuité pour crimes de guerre et génocide. Pourtant, la gravité des faits continue d’être niée par plusieurs responsables politiques. Début juillet, Milorad Dodik, président de l’entité serbe de Bosnie, affirmait encore : « Les Serbes n’ont pas commis de génocide à Srebrenica et il n’a pas eu lieu ».
Il y a 30 ans, le 11 juillet 1995, en plein cœur de l'Europe, à #Srebrenica, les forces serbes massacraient dans l'indifférence du reste du monde, 8372 bosniaques psq musulmans.
— KayıTürk (@KayiTurk_) July 11, 2025
Aux morts, aux survivants,
Nous n'oublions pas. 🤲 pic.twitter.com/ewF0dY1XG7
En 2024, l’Assemblée générale de l’ONU a instauré une Journée internationale de commémoration du génocide de Srebrenica, fixée au 11 juillet, malgré la vive opposition de la Serbie. Ce vendredi 11 juillet, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a rappelé que : « une génération entière a été perdue ».
« Hier Srebrenica, aujourd’hui Gaza »
Le génocide à Gaza a ravivé les lignes de fracture en Bosnie. Propalestiniens de longue date, les Bosniaques établissent un parallèle entre le siège de Sarajevo dans les années 1990 et celui de Gaza aujourd’hui. Le slogan « hier Srebrenica, aujourd’hui Gaza » traduit cette perception partagée d’une communauté de destin entre les deux peuples. « Le fait que les Bosniaques et les Palestiniens soient musulmans sunnites renforce encore cette relation », souligne l’universitaire Valentino Grbavac. À l’inverse, Milorad Dodik, président de l’entité serbe de Bosnie, réaffirme régulièrement son soutien à Israël, avec lequel il a renforcé ses liens, notamment avec le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou