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Rapport sur les Frères musulmans : une alerte « irrationnelle et infondée »

Le départ officieux de la campagne présidentielle 2027 ? Ce mercredi 21 mai, Emmanuel Macron préside un conseil de défense nationale consacré à l’examen d’un rapport sur les “Frères musulmans”, présentés comme une « menace pour la cohésion nationale ». Ce rapport de 70 pages, publié la veille, décrit une prétendue stratégie d’implantation du mouvement en France et en Europe. Récap.

Le rapport tant attendu, consulté par Mizane Info, rédigé à deux hauts fonctionnaires de l’état et commandé par le ministère de l’intérieur, met en lumière ce qu’il décrit comme le « caractère subversif du projet porté par les Frères musulmans », visant à « œuvrer sur le long terme pour obtenir progressivement des ajustements des règles nationales ». Un conseil de défense, présidé par Emmanuel Macron, a lieu ce mercredi pour examiner ce texte et « prendre des mesures ».

Dissimulation et conquête de la société française

Le texte stipule, introduction, que « la confrérie des Frères musulmans repose sur des cercles concentriques, dont le noyau dur est composé d’un “cercle restreint” de militants assermentés. (…) Elle ne regrouperait que quelques centaines d’adhérents. La mouvance “frériste”, comprise de manière plus large, englobe tous ceux qui, influencés ou en contact avec ce cercle, en reprennent les modes opératoires ». Aucun nom précis n’est toutefois mentionné pour étayer ces affirmations.

Le rapport s’attarde longuement sur les figures d’influence idéologique de ce courant, évoquant, en vrac, Youssef al-Qaradawi, Tariq Ramadan, Hassan Iquioussen ou encore Marwan Muhammad, mais sans établir de lien clair entre eux, si ce n’est une vision commune d’action sociale pour les musulmans en Europe. Le document accuse les « Frères musulmans » de recourir à la dissimulation idéologique, au « double discours », à la victimisation et à l’intégration citoyenne comme leviers d’action.

« Les Frères musulmans dissimulent leurs intentions réelles en affichant partager les principes occidentaux », peut-on y lire. Le rapport évoque la stratégie « de dissimulation » visant une « conquête progressive des relais de pouvoir ». Il décrit notamment le développement de « réseaux favorisant le repli communautaire, jusqu’à créer des écosystèmes islamistes ».

Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, évoque pour sa part un « islamisme à bas bruit », visant à « faire basculer toute la société française dans la charia ». Cependant, le rapport concède que « aucun document récent ne démontre la volonté de Musulmans de France d’établir un État islamique en France ou d’y imposer la charia ».

L’organisation des Musulmans de France, antenne nationale du frérisme ?

L’ancienne Union des organisations islamiques de France (UOIF), fondée en 1983 et rebaptisée Musulmans de France, en 2017, est considérée, selon le rapport, comme l’émanation française du frérisme. Une allégation que conteste fermement l’organisation, qui, dans un communiqué publié en réaction au rapport, rejette « toute allégation qui tenterait de nous associer à un projet politique étranger, ou à une stratégie d’‘entrisme ».

L’instance dénonce une « lecture idéologique qui ne reflète ni notre réalité institutionnelle ni notre action de terrain ». Pour Haoues Seniguer, chercheur et maître de conférences à Sciences Po Lyon : « Les Musulmans de France sont dans une logique de transmission religieuse, mais ne prônent pas l’application de la charia ni la création d’un État islamique. ».

Lire sur le sujet : La menace des Frères musulmans : nouveau paravent de Gérald Darmanin

Il précise, en contredisant les conclusions du rapport qu’un Frère musulman installé en France « connaît trop bien les contraintes juridiques, politiques et culturelles pour croire qu’un tel projet soit réalisable ici ». Le rapport estime également, toujours sans références précises, que 7 % des 2 800 lieux de culte musulmans en France – fréquentés par 91 000 fidèles lors des prières du vendredi – seraient liés à cette mouvance. Il évoque aussi une progression de l’islam rigoriste dans une vingtaine de départements.

L’intégration sociale devient un « écosystème frériste »

Le champ éducatif est décrit comme une « priorité stratégique » des Frères musulmans en France, et le rapport s’inquiète d’une « rigorisation des pratiques religieuses », illustrée notamment par « l’augmentation du port de l’abaya chez les jeunes filles ». Haoues Seniguer alerte cependant sur une confusion : « Il y a une distinction à faire entre le conservatisme religieux et une volonté de renverser l’ordre social ou politique ».

Selon lui, croire que les Frères musulmans peuvent instaurer la charia ou prendre le pouvoir relève d’« une peur irrationnelle et infondée ». Le texte désigne aussi les structures associatives, les commerces dits communautaires, et la participation de certains musulmans à la vie publique comme formant un « écosystème frériste » orienté vers une stratégie de pénétration institutionnelle.

L’enquête critique également l’usage politique du terme « islamophobie », qu’il associe à des réseaux « proches des Frères musulmans », visant à « délégitimer la laïcité et les politiques contre le séparatisme ». En conclusion, le document appelle à une « sensibilisation de l’opinion publique », conjuguée à « un discours laïc réactualisé » et à des « signaux clairs et positifs en direction des musulmans ».

« Que doit faire le culte musulman pour être considéré ? »

Dans un timing qui interroge, en lien avec la publication du rapport, l’ancien Premier ministre Gabriel Attal a rapidement proposé plusieurs mesures visant la communauté musulmane. Trois propositions de loi ont été révélées : l’interdiction du port du voile dans l’espace public pour les mineures de moins de 15 ans, la création d’un délit de contrainte au port du voile pour les filles mineures et une nouvelle loi contre l’« entrisme islamiste », venant s’ajouter à celle de 2021 sur le séparatisme.

Dans son communiqué, Musulmans de France exprime ses interrogations quant aux motifs réels d’un tel rapport mis à disposition du public : « Le culte musulman se trouve aujourd’hui confronté à une double injonction contradictoire : réussir est suspecté d’entrisme, ne rien faire devient du séparatisme. Il est légitime de se demander : que doit faire réellement le culte musulman pour être considéré avec équité et respect, comme les autres cultes reconnus en France ? »

« Tout effort d’intégration est perçu comme une stratégie d’infiltration, toute prudence comme un repli communautaire », ajoute l’instance qui appelle à un « débat lucide et apaisé, pour sortir de ce piège des intentions présumées, et reconnaître aux musulmans de France le droit d’organiser leur culte dans le cadre républicain, sans suspicion constante ».

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