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mardi 19 mars 2024

Le jeûne chez Ibn Arabi : un non-acte singulier

Le jeûne chez Ibn Arabi : un non-acte singulier Mizane.info

Islam Belala présente sur Mizane.info un résumé succinct des éléments du chapitre 71 des Futuhat Makkiya d’Ibn Arabi consacré au sens et à la portée théologique du jeûne.

Le jeûne (al-sawm) véhicule deux significations quant à la langue : abstention (imsak) et élévation (rif’a). Le sens premier est assez commun. Le second sens, l’élévation, est exprimé par exemple dans le vers de Imru Al-Qays quand il dit : « idha « sama » al-naharou wa hajjara » (« si le jour s’est « levé » »).

Ainsi, le nom de cette adoration est « sawm » car elle surpasse toutes les autres formes de servitudes. (Je parle d’adoration et non pas « d’acte d’adoration » pour une raison précise que j’indiquerai après.)

Un geste de pure négativité

Le fait de surpasser les autres adorations est véhiculé par la non-connaissance de la récompense liée au jeûne. Le jeûne surpasse les autres adorations, mais en même temps il n’est comparable à aucune autre adoration.

Le jeûne est non-acte (c’est pour cela que ce n’est pas un « acte d’adoration » au sens basique) dans la mesure où il n’est pas une œuvre que l’on fait (comme faire la prière, donner l’aumône, se déplacer à la Mecque…).

Jeûner est toujours défini négativement : ne pas manger, ne pas boire… Donc, nier le fait qu’il soit comparable c’est lui donner un caractère privatif (non-X). C’est alors naturellement que l’on lie le jeûne à Dieu puisque « Il n’y a rien qui Lui soit comparable » (42/11).

Le hadith de Abu Umama rapporté par Al-Nasai renforce textuellement, scripturairement et littéralement cette idée de « Il n’y a rien qui Lui soit comparable » quant au jeûne. Ce hadith dit la chose suivante : « Tout acte du fils d’Adam lui revient, sauf le jeûne. Il est certes à Moi et c’est Moi qui le rétribue. »

Une imitation de Dieu

Le non-acte ne se résume pas à la privation quant aux éléments annulatifs du jeûne du point de vue canonique puisqu’il est exigé aussi de renoncer (non-acte, encore une fois) aux paroles obscènes, aux mensonges, aux tricheries, aux disputes… C’est ainsi que le jeûne déploie sur le jeûneur son caractère « protecteur ».

Dieu n’est comparable à rien, de même que le jeûne. De fait, le jeûneur emprunte à Dieu cette qualité de « non-comparable ».

Le hadith qudsi rapporté par Muslim affirmant que toutes les œuvres appartiennent à l’homme sauf le jeûne qui, lui, appartient à Dieu et c’est Lui qui le récompense explique ce rapprochement entre Dieu et le jeûneur du point de vue de la non-comparabilité. Le jeûne véhiculant l’attribut de l’Autosuffisance divine (qui consiste à ne pas dépendre de la nourriture) stipule que la récompense ne saurait être quantifiée.

Bien plus, la compréhension du hadith qudsi peut être double : la première est celle que j’ai donnée « c’est Dieu qui le récompense » ; et la seconde est « c’est Dieu qui en est la récompense ». Le jeûneur rencontre donc son Seigneur « content de son jeûne » (comme dit le hadith) car il rencontre Dieu avec un attribut commun, c’est-à-dire la non-comparabilité : « Il n’y a rien qui Lui soit comparable ».

La porte de la perfection

Tout cela explique pour quelles raisons Dieu a consacré aux jeûneurs une Porte d’accès au Paradis qui leur est propre : Al-Rayan. Ce nom qui vient de « ray » (celui qui est désaltéré) véhicule un aspect de perfection étant donné que celui qui est désaltéré ne saurait boire davantage, il est arrivé au « sommet », pourrait-on dire. Le buveur est arrivé à la perfection. La Porte et le nom de cette Porte, par la perfection constatée, donnent un argument supplémentaire quant à la non-comparabilité du jeûne avec les autres adorations : l’incomparable est seul réellement parfait.

Enfin vient l’étude des différents degrés de cet acte que j’indiquerai seulement sans les détailler :

-le jeûne du commun : s’abstenir des annulatifs canoniques ;

-le jeûne de l’âme ordonnatrice des membres : s’abstenir des interdits du corps ;

-le jeûne du cœur : contenir Dieu dans le cœur ;

-le jeûne du cœur d’un degré supérieur : contenir Dieu et chasser tout le reste.

Très bon ramadan à tout le monde.

Islam Belala

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