Les personnes d’origine étrangère ou en situation de handicap sont l’objet de discriminations dans l’accès et le parcours de soins en France, selon un rapport publié mardi 6 mai par la Défenseure des droits. Ces inégalités ont des effets « délétères immédiats et durables », poussant certains patients à retarder ou renoncer à se faire soigner, alerte l’institution. Focus.
Minimisation des douleurs, refus de soins, actes pratiqués sans consentement… Le rapport 2025 de la Défenseure des droits souligne que le sexe, l’origine, mais aussi la précarité, le handicap ou encore l’âge, figurent parmi les motifs de discriminations dans l’accès aux soins en France.
Discrimination « à toutes les étapes » de la prise en charge
En 2022, 224 signalements ont été recensés par les ordres professionnels et l’Assurance maladie, et 31 saisines ont été adressées à la Défenseure des droits. Toutefois, l’institution précise que « l’ampleur des discriminations dans les parcours de soins dépasse largement » ces chiffres.
Si les refus de soins sont la forme la plus visible de ces discriminations, « elles peuvent survenir à toutes les étapes de la prise en charge, y compris de manière plus insidieuse dans la relation entre soignant et patient », observe l’autorité indépendante chargée du respect des droits.
En principe, un professionnel de santé ne peut refuser un patient, sauf en cas de dépassement de sa capacité d’accueil, de demande hors champ de compétence, ou si le patient a eu un comportement agressif. Mais dans la pratique, ces principes sont souvent contournés.

Le préjugé du « syndrome méditerranéen »
Pour les personnes étrangères en situation irrégulière, l’un des premiers obstacles est l’accès à l’aide médicale de l’État (AME), puis l’obtention d’un rendez-vous. « On oppose souvent un refus de prise en charge au motif que l’établissement ne prend pas l’AME, en invoquant des difficultés administratives », explique Guillaume Bellon, coordinateur à Saint-Denis.
Les femmes perçues comme méditerranéennes seraient particulièrement exposées à une moindre qualité de soins. « Un stéréotype raciste suggère qu’elles exagéreraient leurs douleurs de manière théâtrale, ce qui justifie à tort une prise en charge moins attentive », souligne-t-il.
Le rapport dénonce également le « syndrome méditerranéen », un préjugé infondé selon lequel les personnes originaires du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne exagéreraient leurs douleurs, entraînant une minimisation des symptômes ou un refus de soins, parfois aux conséquences dramatiques.
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Des conséquences « délétères immédiats et durables »
Les bénéficiaires de la CMU, de la CSS ou de l’AME sont également touchés, peinant à obtenir des rendez-vous médicaux. Quant aux personnes en situation de handicap, elles se heurtent à des refus pour des raisons comme l’inaccessibilité des locaux, le manque de temps ou de matériel adapté.
La Défenseure des droits s’alarme de nombreuses violations du droit à une information claire et au consentement éclairé du patient. Ces discriminations ont, selon elle, des effets « délétères immédiats et durables » sur les parcours de soins, et appelle l’État à instaurer une stratégie nationale pour y mettre fin.