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France : quand l’hôpital traque les couvre-chefs des soignantes musulmanes

À l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, une infirmière musulmane a été récemment licenciée pour avoir porté un calot, pourtant utilisé couramment dans les établissements de santé. Cette injonction, invoquée au nom de la laïcité, tend à se généraliser et plonge de nombreuses soignantes musulmanes – ou perçues comme telles – dans l’incertitude.

Selon les révélations de Mediapart, Majdouline B., infirmière depuis sept ans à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, a été renvoyée le 10 novembre, après une succession de convocations ayant mené à un conseil disciplinaire. Le motif ? Le port d’un calot, pourtant répandu dans les services hospitaliers. Le cas de Majdouline n’est pas isolé et illustre une véritable traque des couvre-chefs visant des soignantes musulmanes, ou perçues comme telles, à l’hôpital depuis plusieurs années.

Aucune remarque de la direction hospitalière entre 2018 et 2024

L’arrêté a été signé par la directrice du groupe hospitalier Sorbonne-Université (AP-HP), qui regroupe trente-huit établissements publics. La décision du renvoi de Majdouline, en poste depuis 2018, repose sur un simple morceau de tissu : un calot, habituellement utilisé dans les blocs opératoires.

Elle explique avoir porté ce calot quotidiennement depuis son arrivée sans jamais avoir été inquiétée. Jusqu’en décembre 2024, où « du jour au lendemain, la direction des soins a décidé que plus personne ne devait avoir de couvre-chef sur la tête, ni charlotte, ni bonnet, ni calot, plus rien », se souvient-elle.

Une charte de la laïcité excluante

Dès octobre 2023, la direction de la Pitié-Salpêtrière avait durci sa ligne. L’hôpital avait alors diffusé un « guide de laïcité » indiquant que « le port d’une charlotte […], en dehors des situations dans lesquelles elle est requise pour les besoins du service, peut constituer l’expression d’une appartenance religieuse et, ainsi, un comportement professionnel fautif ».

Un an plus tard, en décembre 2024, la direction a réaffirmé cette orientation en imposant au personnel la signature d’une « Charte de la laïcité dans les services publics ». Pour Blandine Chauvel, élue Sud Santé, une véritable « chasse aux bonnets, aux bouts de tissu » est en cours. Elle précise qu’elle vise avant tout « les personnes selon leur origine ou leur religion supposée ». Sous couvert de « respect de la laïcité », ce sont une fois de plus les soignantes musulmanes — ou perçues comme telles — qui se retrouvent ciblées.

« Il n’a jamais été établi que le couvre-chef de Majdouline ait une quelconque connotation religieuse », souligne la section Sud Santé dans son rapport d’accompagnement. Elle rappelle que « le simple fait de présupposer une appartenance religieuse à partir d’un signe vestimentaire ou d’une apparence physique constitue en soi une discrimination fondée sur l’origine ou la religion supposée ».

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Un climat national de surenchère islamophobe

En 2019 déjà, le tribunal de Montreuil avait estimé que porter un couvre-chef hors des zones où il est requis « pouvait signifier une appartenance religieuse » et justifier des sanctions, voire une exclusion. La politique actuelle autour des couvre-chefs n’est donc pas anodine Le cas de Majdouline, comme celui d’autres personnels, s’inscrit dans un climat national de surenchère islamophobe.

La « Charte de la laïcité dans les services publics » imposée à la Pitié-Salpêtrière participe pleinement de cette dynamique : une instrumentalisation de la laïcité destinée à soutenir une véritable police vestimentaire visant des femmes musulmanes ou supposées l’être, désormais appliquée directement dans les services hospitaliers. Majdouline compte déposer, dans les prochains jours, un recours devant le tribunal administratif.

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