Le président syrien Ahmed Al-Charaa et Vladimir Poutine, ennemis durant la guerre en Syrie, ont choisi d’occulter le passé pour entamer des discussions, ce mercredi, autour de plusieurs dossiers stratégiques : le sort de Bachar Al-Assad, le maintien des bases militaires russes, ainsi que le renforcement de la coopération sécuritaire et économique.
Reçu, ce mercredi, à Moscou par le président russe Vladimir Poutine, Ahmed Al-Charaa a annoncé vouloir « redéfinir » les relations entre la Syrie et la Russie, malgré un passé tourmenté entre les deux nations. Le nouvel homme fort syrien, ancien « jihadiste », se présente désormais comme un homme d’État pragmatique, venu ouvrir un nouveau chapitre avec Vladimir Poutine, au nom des « liens historiques anciens » entre Damas et Moscou et des « intérêts communs » des deux pays.
Bachar Al-Assad ne sera pas livré
« Nous respectons tous les accords précédents et cette grande histoire. Nous essayons de restaurer et de redéfinir la nature de ces relations afin que la Syrie puisse jouir de son indépendance, de sa souveraineté, ainsi que de son unité et de son intégrité territoriales », a déclaré, en amont le président syrien. Ahmed Al-Charaa espère obtenir le soutien de la Russie pour la reconstruction du pays, ainsi que des compensations économiques liées aux dommages de guerre.
Premier dossier : Bachar Al-Assad. « Le président Al-Charaa va demander au président russe de remettre tous ceux qui ont commis des crimes de guerre et se trouvent en Russie, en premier lieu Bachar Al-Assad », a indiqué un responsable syrien avant la rencontre entre les deux dirigeants.
Finalement, le président syrien s’est abstenu de réclamer publiquement que Moscou livre l’ancien dictateur pour qu’il soit jugé pour crimes de guerre. Une demande à laquelle la Russie ne devrait pas accéder. Lundi, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a réaffirmé que Moscou avait accordé l’asile à Bachar Al-Assad et à sa famille pour « des raisons purement humanitaires ».
Aide économique et sécuritaire en Syrie
Ensuite, face à l’impératif économique et la menace de fragmentation du pays — notamment les affrontements ayant opposé les forces gouvernementales syriennes aux alaouites en mars, puis aux druzes en juillet — Ahmed Al-Charaa a choisi la voie du compromis avec Moscou.
Le président syrien cherche à s’assurer que la Russie ne joue pas un rôle déstabilisateur, tout en espérant son appui pour contrer les ingérences israéliennes dans le Sud syrien. Israël, qui a étendu son emprise sur le plateau du Golan, réclame l’élargissement de la zone démilitarisée et la création d’un corridor humanitaire vers la province druze de Souweïda.
À l’image des patrouilles menées par la Russie dans le Sud syrien sous le régime d’Al-Assad, la possibilité d’un redéploiement de la police militaire russe pour garantir la sécurité face à d’éventuels empiètements israéliens est évoquée, selon des sources citées par Reuters.
Lire sur le sujet : Syrie : une levée des sanctions qui demande concession
Les deux bases russes pérennisées
Le président Al-Charaa a notamment promis d’honorer les accords signés entre Damas et Moscou sur les deux principales bases russes sur la côte syrienne. Ces sites, seuls avant-postes officiels de la Russie hors de l’ex-URSS, permettent à Moscou d’étendre son influence en Afrique et en Méditerranée.
La Russie souhaite aussi sécuriser ses intérêts économiques et énergétiques en Syrie, notamment dans les hydrocarbures, les phosphates et les télécommunications. « Il y a des gisements [pétroliers] qui nécessitent d’être développés, d’autres en sommeil, et de nouveaux gisements. Nous sommes prêts également à participer », a affirmé le vice-ministre russe Alexandre Novak.
A lire aussi :
