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Gaza : « le massacre de masse » se poursuit dans un silence indigne

Alors que Benjamin Netanyahou tente de détourner l’attention du monde en déclenchant, unilatéralement, une guerre contre l’Iran, le massacre quotidien des Palestiniens de Gaza et leur famine se poursuivent « à plein régime ». Dans un texte publié sur Middle East Eye, la journaliste palestinienne Linah Alsaafin déplore que « le premier génocide médiatisé au monde » se prolonge dans un silence indigne. Focus.

Loin de s’atténuer ou de ralentir, le massacre de masse, le déplacement et la famine provoquée sur la population palestinienne assiégée à Gaza se poursuivent à plein régime depuis qu’Israël a commencé à attaquer l’Iran il y a deux semaines. 

Mais au lieu de placer ce problème au centre de l’attention – alors même que nous avons vu, pour la première fois, des villes et villages israéliens bombardés – la destruction délibérée de Gaza a été réduite, au mieux, à une statistique passagère comptant des morts quotidiennes. Au pire, elle a été complètement ignorée. 

Dans la nuit de mardi à mercredi, le président américain Donald Trump a annoncé que l’Iran et Israël avaient convenu d’un cessez-le-feu, suite aux frappes coordonnées menées par l’Iran contre la base aérienne américaine évacuée d’Al Udaid, sur le territoire qatari. Le même jour, avant midi, 71 Palestiniens avaient été tués dans la bande de Gaza, 50 la veille et 200 autres dans les 48 heures précédentes.   

La journaliste Linah Alsaafin

Les sites du GHF sont des pièges mortels

Le premier génocide médiatisé au monde se poursuit sous le thème d’une déshumanisation abjecte et d’une vérité universellement reconnue : les Palestiniens sont censés mourir, et ils doivent le faire en silence. Ahmad al-Farra, chef du service de pédiatrie et d’obstétrique de l’hôpital Nasser, a averti que les bébés en soins intensifs néonatals risquaient de mourir dans les 24 à 48 heures en raison d’une pénurie de lait maternisé pour prématurés – une conséquence directe du siège israélien.  

Quand je pense aux soldats israéliens, à la gâchette facile, qui attirent des gens désespérés et affamés vers un site en leur promettant de la nourriture, pour ensuite les abattre avec des balles de sniper et des tirs d’artillerie – sans faire de distinction entre hommes, femmes et enfants – je pense aux limites de la langue de Shakespeare pour décrire de tels actes odieux.  

Organisés par la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF), soutenue par les États-Unis , ces « centres d’aide » sont en fait des pièges mortels qui ont tué plus de 450 Palestiniens depuis qu’ils ont commencé à distribuer de maigres fournitures il y a un mois. Avant le 7 octobre 2023, à l’apogée du blocus israélo- égyptien sur Gaza, 500 camions en moyenne entraient quotidiennement sur le territoire.

Colis de la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF)

Mais après qu’Israël a imposé un blocus total à Gaza le 2 mars, interdisant toute aide alimentaire ou humanitaire, le GHF est devenu l’unique moyen d’acheminer une aide vitale. Le génocide israélien a tué des milliers d’enfants, qui représentent la moitié de la population de Gaza. Il les a privés d’avenir, les privant d’éducation et d’une vie digne. Il a créé la plus grande cohorte d’enfants amputés de l’histoire récente.  

« Il n’y a plus rien à manger, plus rien du tout »

Selon les Nations Unies, le nombre d’enfants de moins de cinq ans souffrant de malnutrition aiguë à Gaza a presque triplé au cours de la deuxième quinzaine de mai par rapport aux trois mois précédents. Cette famine artificielle, à grande échelle, pousse les gens vers les centres GHF, où, avec un peu de chance, ils peuvent obtenir un sac de farine.

Sinon, ils risquent la mort ou de rentrer chez eux les mains vides après avoir enduré un voyage de plusieurs heures, l’estomac vide. Mohammad al-Darbi, un garçon de 12 ans qui, après huit heures de marche, a obtenu deux kilos de farine – pour ensuite être dépouillé par des voleurs – a imploré la pitié du monde complice et s’est bourré la bouche de sable. « Il n’y a plus rien à manger, plus rien du tout », sanglotait-il.

Lire sur le sujet : Gaza : Le « piège mortel » des sites humanitaires gérés par Israël

Quelques jours plus tôt, le corps sans vie de Mohammad Yousef al-Zaanin, 20 ans, avait été transporté au milieu de la foule sur une palette en bois, ses vêtements maculés de farine. Originaire de Beit Hanoun, une ville du nord en grande partie détruite, le jeune homme était parti dans l’espoir de rapporter un sac de farine pour sa mère et ses sept sœurs, déplacées et affamées. Mais son histoire, sa vie et sa mort, ont été largement ignorées. 

En mai, le mari et les neuf enfants d’un pédiatre ont été tués lors d’une frappe aérienne contre leur domicile. Certains corps ont été carbonisés et méconnaissables. La normalisation sadique du massacre de familles entières se répète sans cesse.« La souffrance ici est immense », a écrit Fadel Naim, chirurgien orthopédiste à Gaza, qui affirme que les hôpitaux, à peine opérationnels, accueillent chaque jour des centaines de blessés.  « Les familles sont déchirées non seulement par les bombes, mais aussi par la faim, la peur et le désespoir. Et pourtant, le monde reste largement silencieux ».

La position victimaire d’Israël face à l’Iran

Dans ce contexte, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu souhaite déclencher une guerre régionale, dans le but de sauver sa carrière politique et de restaurer le paradigme de la dissuasion, brisé après l’offensive du 7 octobre 2023. Même avec le soutien des régimes arabes fantoches – principalement l’Égypte, la Jordanie et les Émirats arabes unis – et le soutien sans réserve de la plupart des pays occidentaux, l’idée d’un génocide de près de deux ans provoque inévitablement des critiques.

L’Iran et l’allégation, facilement démentie, de son acquisition imminente de la bombe nucléaire (pensez aux armes de destruction massive inexistantes de l’Irak) ont été le parfait épouvantail, un épouvantail qui a mis des années à se matérialiser.  La propagande israélienne victimaire, suite aux attaques iraniennes, notamment la vague de condamnations hypocrites et d’accusations de « crimes de guerre » après l’explosion d’un hôpital israélien, ne trompe personne.

Parallèlement, depuis le 12 juin, Israël a tué plus de 430 personnes en Iran et en a blessé 3 500. Parmi les victimes figurent non seulement des militaires et des scientifiques nucléaires, mais aussi des poètes, des athlètes et des enfants. 

Gardez les yeux rivés sur Gaza !

Pendant ce temps, Israël continue de larguer des bombes de fabrication américaine sur les « zones de sécurité » de Gaza, où les tentes sont le seul abri pour les Palestiniens déplacés, dont la plupart ont perdu leur maison et ont été contraints de fuir d’un endroit à un autre à plusieurs reprises au cours des 20 derniers mois. Bombarder des espaces aussi surpeuplés anéantit des familles entières.  

Les décombres de Gaza

Même les spéculations théâtrales d’Israël sur un cessez-le-feu ont disparu des médias, sans parler de négociations ni de délégations se déplaçant du Caire à Doha. Personne ne parle au nom des Palestiniens de Gaza – ni l’Autorité palestinienne collaborationniste en Cisjordanie occupée, ni même leurs propres compatriotes, qui semblent considérer les boycotts, les manifestations et la désobéissance civile efficaces de la première Intifada comme une relique du passé.  

Comme le dit Meqdad Jameel, écrivain et chercheur Gazaoui : « Les gens sont devenus des fantômes. Chacun vit dans une terrible angoisse, horrifié à l’idée que le génocide va se poursuivre sans fin, sans aucune idée de comment l’arrêter ». Et ces personnes épuisées et profondément traumatisées continuent d’être réduites à des statistiques, au lieu de recevoir l’attention internationale qu’elles méritent.  

Gardez les yeux rivés sur Gaza. Nous les avons déjà terriblement déçus ; le moins que nous puissions faire est de continuer à parler, à faire du bruit et à amplifier leurs récits. Nous devons mettre fin à la normalisation du massacre quotidien des Palestiniens. 

Linah Alsaafin

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