173 actes « anti-musulmans » ont été constatés par le ministère de l’intérieur en 2024. Un chiffre largement sous-évalué, selon un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), rendu mercredi dernier. « Il ne fait bon être musulman en France », estime le recteur de la Grande Mosquée de Paris. Chems-eddine Hafiz qui vient de publier le livre « Défaire les ombres » aux éditions Albouraq.
Les actes visant la communauté musulmane sont largement sous-estimés, selon un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) rendu ce mercredi 18 juin. Cette sous-évaluation s’explique en grande partie par une sous-déclaration de la part des victimes. Un constat que Chems-eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, confirme en indiquant avoir lui-même été violemment agressé.
La République « doit se soucier de tous ses enfant »
« Mon livre n’est pas le procès de la République, mais un appel à ce qu’elle prenne les mesures appropriées pour stopper cela [l’islamophobie]. Elle doit se soucier de tous ses enfants, sans craindre de nommer les choses », souligne le recteur, qui vient de publier Défaire les ombres : islam, République et exigence de vérité.
Ancien avocat et défenseur de la laïcité, Chems-eddine Hafiz plaide depuis des années pour un islam ancré dans les valeurs françaises. Mais aujourd’hui, le ton s’est durci. Il parle de « stigmatisation » généralisée des musulmans dans les discours politiques et médiatiques, et dénonce sans détour une « instrumentalisation » de la loi de 1905, texte fondateur de la laïcité française.
À l’occasion de la parution de son ouvrage, il évoque l’émergence d’une « islamophobie d’atmosphère » dans un entretien accordé, dimanche, à Ouest-France,. Une islamophobie qui, selon lui, « sévit dans toute l’Europe depuis notamment le 7 octobre 2023 ».
« C’est dommage que tant de citoyens de notre pays soient stigmatisés. Ça dure depuis des années… »
— Grande Mosquée de Paris (@mosqueedeparis) June 17, 2025
Dans cet extrait engagé, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, dénonce une situation qui perdure et appelle à la responsabilité.
Son livre Défaire les… pic.twitter.com/S2UVV0yqtx
Des chiffres ministériels sous évalués
Le recteur rappelle qu’en 2024, le ministère de l’Intérieur a répertorié 173 actes antimusulmans en France, et que deux crimes ont été commis en avril et mai derniers : ceux d’Aboubakar Cissé, ressortissant malien, et Hichem Miraoui, d’origine tunisienne. Il signale également qu’un groupe terroriste d’ultra-droite est en instance de jugement pour avoir tenté d’empoisonner de la nourriture halal et d’assassiner des imams.
Le rapport de la CNCDH, publié mercredi dernier, conclut que les chiffres officiels sont largement sous-évalués. Chems-Eddine Hafiz confirme : « J’ai moi-même été victime d’une agression d’une violence inouïe, par un couple, dans un restaurant. Avec des gros mots, des menaces de mort. J’étais tétanisé. »
« Il faut admettre que nous avons été accusés de beaucoup de choses […] Le degré islamophobe est au plus haut. Il ne fait pas bon être musulman en France. »
« Il faut que le terme islamophobie soit utilisé »
Selon lui, « la seule façon de condamner » les actes islamophobes, c’est de signaler et de déposer plainte : « Il faut que l’on sensibilise notre communauté religieuse à porter plainte, sans hésiter et attendre, dès qu’un acte anti-musulman est constaté . Il constate qu’« aujourd’hui, de nombreuses victimes renoncent à se rendre au commissariat, se demandant si leur parole sera bien accueillie ou utile ».
Parmi les actions concrètes, il cite la création de l’Association de défense contre les discriminations et les actes anti-musulmans (ADDAM), qui met à disposition des victimes un formulaire de signalement. Chems-Eddine Hafiz pointe notamment une « exception française » : « En France, on n’arrive pas à placer un mot sur l’infraction. » Pour lui, cela « pose problème » : « Il faut que le terme islamophobie soit utilisé. »
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