Selon les mots de Netanyahou, l’aide supervisée par la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF) constitue un « plan de guerre et de victoire ». Dans un article, publié chez Middle East Monitor, l’auteur palestinien Ramzy Baroud revient sur le rôle politique et le fiasco engendré par cette initiative humanitaire israélo-américaine ayant pour véritable objectif de « prendre le contrôle de toute la bande de Gaza ».
Juste un jour avant que la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF) ne commence officiellement à opérer dans Gaza, son directeur exécutif, Jake Wood, a démissionné. Le texte de sa déclaration de démission souligne ce que beaucoup soupçonnaient déjà : le GHF n’est pas une entreprise humanitaire, mais la dernière escroquerie du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou pour contrôler Gaza, après 600 jours de guerre génocidaire.
« Il est clair qu’il n’est pas possible de mettre en œuvre ce plan tout en adhérant strictement aux principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance », a déclaré Jake Wood dans un communiqué, cité par CNN. Cela soulève la question : pourquoi Wood avait-il compris cette évidence, alors même que l’opération d’aide n’était pas encore effective ?

Une création artificielle et usurpatrice
En réalité, une enquête des autorités suisses, sur le GHF, avait déjà été ouverte. La chaîne d’information américaine CBS s’est penchée sur la question et a rapporté le 29 mai que GHF avait initialement déposé sa demande d’enregistrement à Genève le 31 janvier et avait été officiellement enregistrée le 12 février. Cependant, très vite, les autorités suisses ont constaté des violations répétées, notamment le fait que la branche suisse de GHF « ne remplit actuellement pas diverses obligations légales ».
Dans sa demande initiale, le GHF « poursuit exclusivement des objectifs philanthropiques caritatifs au bénéfice de la population ». Étrangement, l’entité qui avait promis de fournir des services « matériels, psychologiques ou de santé » aux Gazaouis, frappés par la famine, a jugé nécessaire d’employer 300 mercenaires américains « lourdement armés », avec « autant de munitions qu’ils peuvent en transporter », a rapporté CBS.
Le soutien « psychologique » en particulier était le plus ironique, puisque des Gazaouis désespérés ont été parqués, le 27 mai, dans des cages sous des températures extrêmement élevées, pour ne recevoir que de minuscules quantités de nourriture qui, selon Rami Abdu, directeur de l’Euro-Med Monitor basé à Genève, avaient en fait été subtilisé à une organisation caritative basée aux États-Unis, connue sous le nom de Rahma Worldwide
Le mécanisme d’aide fait partie d’un plan de guerre
À la suite du reportage de CBS, et après plusieurs jours de chaos et de violence à Gaza, où au moins 49 Palestiniens ont été tués et plus de 300 blessés par ceux qui avaient promis de leur apporter aide et réconfort, le journal israélien Haaretz a révélé que le financement de l’opération provenait directement d’Israël.

Avigdor Lieberman, membre politique israélien de la Knesset, est allé encore plus loin en affirmant que l’argent, estimé à 100 millions de dollars , « provient du Mossad et du ministère de la Défense ». Mais pourquoi Israël se donnerait-il tant de mal alors qu’il peut, sans aucun coût financier, simplement permettre aux cargaisons massives d’aide, qui stationnent du côté égyptien de la frontière, d’entrer dans Gaza et d’éviter la famine ?
Pour Netanyahou, le mécanisme d’aide fait partie intégrante de la guerre. Dans un message vidéo rapporté par le Jerusalem Post le 19 mai, il a décrit les nouveaux points de distribution d’aide, gérés conjointement par le GHF et l’armée israélienne, comme « parallèles à l’énorme pression » qu’Israël exerce sur les Palestiniens dans le but de « prendre le contrôle de toute la bande de Gaza ».
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Selon les propres mots du premier ministre israélien, l’aide organisée par l’armée constitue « le plan de guerre et de victoire ». Bien entendu, les Palestiniens et les organisations humanitaires internationales opérant à Gaza, y compris les organismes humanitaires liés à l’ONU, étaient pleinement conscients que le plan secret israélo-américain reposait sur de mauvaises intentions.
Pousser les Palestiniens hors de Gaza
C’est pourquoi ils ne voulaient pas y être mêlés. Aux yeux d’Israël, tout mécanisme d’aide qui maintiendrait le statu quo d’avant-guerre et le génocide du 7 octobre 2023 équivaudrait à un aveu de défaite. C’est précisément la raison pour laquelle Israël s’est efforcé d’associer l’UNRWA, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, au Hamas.
Cela a notamment impliqué le lancement d’une campagne virulente contre le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ainsi que d’autres hauts responsables et rapporteurs. Le 22 juillet, la Knesset israélienne est allée jusqu’à qualifier l’UNRWA d’ « organisation terroriste ». N’ayant pas réussi à conquérir Gaza par la force militaire, Israël tente ainsi d’utiliser son dernier plan d’aide pour capitaliser sur la famine qu’il a délibérément provoquée au fil des mois.

En attirant les gens vers des « points de distribution », l’armée israélienne tente de concentrer la population de Gaza dans des zones qui peuvent être facilement contrôlées en tirant profit de la nourriture, dans le but ultime de pousser les Palestiniens, selon les termes de Smotrich, « en grand nombre vers des pays tiers ».
Bien sûr, ce dernier plan est voué à l’échec, comme d’autres stratagèmes similaires au cours des 600 derniers jours. Cependant, le traitement inhumain et dégradant infligé aux Palestiniens illustre une fois de plus le rejet par Israël de la pression internationale croissante visant à mettre fin au génocide. Pour qu’Israël cesse ses complots, la communauté internationale doit traduire ses paroles fortes en actes forts et tenir pour responsables, non seulement Israël, mais aussi ses propres mercenaires impliqués dans le GHF.
Ramzy Baroud
Journaliste, auteur et rédacteur en chef de Palestine Chronicle.