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Rana Dajani : pourquoi j’enseigne la théorie de l’évolution

Rana Dajani : pourquoi j’enseigne la théorie de l’évolution Mizane.info

Rana Dajani est professeure associée de biologie moléculaire à l’Université hachémite de Zarqa, en Jordanie, et chercheuse invitée à l’Institut Faraday de l’Université de Cambridge, au Royaume-Uni. Dans une tribune publiée par Mizane.info, elle explique les raisons qui l’ont motivé à enseigner la théorie de l’évolution à des étudiants musulmans, malgré leur appréhension.

Certaines attitudes problématiques envers la science ont été importées dans les sociétés musulmanes dans le cadre de la mondialisation et de la modernisation rapides – le rejet de la théorie de l’évolution, par exemple. Mais cela offre aussi une opportunité. J’enseigne l’évolution à des étudiants universitaires en Jordanie. Presque tous sont hostiles à cette idée au départ. Leurs professeurs l’ont probablement ignorée ou passée sous silence.

Pourtant, la plupart des étudiants sont disposés à discuter de l’évolution et, à la fin du cours, la majorité l’accepte. Si les étudiants musulmans peuvent remettre en question des idées sur un sujet académique aussi controversé, ils peuvent également aborder d’autres aspects de leur vie en questionnant – et non en acceptant aveuglément – ​​le statu quo. Ces outils et attitudes sont essentiels au développement de leur personnalité et à celui d’une citoyenneté responsable.

Darwin et l’évolution

Les étudiants de mes cours sont souvent surpris. Je porte le hijab, ce qui signifie qu’ils savent que je suis une musulmane pratiquante, et pourtant ils m’entendent soutenir l’évolution comme un mécanisme expliquant la diversité et le développement des espèces, et citer Charles Darwin comme un scientifique ayant contribué à notre compréhension de l’émergence et de la diversification de la vie sur Terre. Je suis presque toujours la première musulmane qu’ils rencontrent à tenir de telles propos.

Certains étudiants se sont plaints à l’université que je prêchais contre l’islam, mais les responsables ont été satisfaits lorsque je leur ai montré que l’évolution figurait dans les manuels universitaires approuvés et que mon cours en était directement inspiré. J’ai félicité les étudiants qui se plaignaient pour leur courage à défendre leurs convictions et leur ai proposé de discuter de leurs préoccupations avec eux.

Dans mon cours, j’explique en détail l’évolution naturelle des plantes et la sélection artificielle. Plus tard, nous abordons la résistance aux antibiotiques, les vaccins contre la grippe et le développement de médicaments contre le VIH. Après ces discussions, la plupart des étudiants sont prêts à accepter l’évolution comme un mécanisme expliquant l’émergence de toutes les espèces, sauf l’humain.

Un sujet tabou

Nombre d’entre eux citent des preuves du Coran qui, selon eux, signifient qu’Adam – et donc les humains – ont été créés spontanément. L’évolution humaine reste taboue, car les étudiants ne sont pas prêts à abandonner l’idée que les humains ont été créés différemment. Je leur rappelle que les musulmans ont été mis en garde contre l’arrogance et que les humains ne sont qu’une partie de la création.

Des savants musulmans tels que Hussein al-Jisr et Ahmad Medhat soutenaient l’évolution dans les années 1880. Avant Darwin, al-Jahiz et d’autres ont proposé des théories évolutionnistes rudimentaires au IXe siècle. Je souligne que la controverse apparente entre l’évolution et l’islam n’a surgi qu’au XXe siècle, lorsque les idées de Darwin ont été associées au colonialisme, à l’impérialisme, à l’Occident, à l’athéisme, au matérialisme et au racisme.

Les savants religieux musulmans ont progressivement pris position contre l’évolution, position que le public a adoptée. Ils ont utilisé les arguments créationnistes chrétiens pour étayer leur position, transférant à l’islam le conflit occidental entre science et religion. Certains de mes étudiants soutiennent qu’accepter l’évolution revient à nier l’existence de Dieu. Je dis que l’évolution ne discute pas des origines de l’univers. Personne ne comprend encore ce commencement. Pour moi, le commencement était Dieu.

Pas de contradiction entre Coran et sciences

Après le commencement, les règles de la logique et de la science ont conduit au développement de l’univers et au-delà. D’après mon expérience, de nombreux musulmans sont disposés à considérer cela. J’ai rencontré plusieurs scientifiques musulmans qui partagent mon point de vue, mais qui ne le disent pas publiquement par crainte d’être taxés de fauteurs de troubles. Certains savants religieux partagent également ce point de vue, mais souhaitent évoluer progressivement afin de ne pas susciter de résistances et de ralentir le progrès.

En tant que scientifique musulman, je considère que le Coran invite les humains à observer et à contempler le monde tout en prônant la quête du savoir. Il ne valide pas les découvertes scientifiques. La science nous permet de questionner et de découvrir le fonctionnement du monde, et le Coran fournit les principes moraux pour y parvenir.

Former des penseurs libres

Si une contradiction apparente apparaît entre une découverte scientifique et une interprétation du Coran, nous pouvons alors nous tourner à la fois vers la science elle-même (qui évolue) et vers l’interprétation du Coran (qui n’est pas impartiale, car elle est un exercice humain) pour expliquer cette divergence. Il s’agit d’un processus continu et fluide, qui fait partie intégrante du but de la vie des musulmans.

Qu’un étudiant accepte ou non l’évolution humaine n’a aucune incidence sur la façon dont je note ses copies d’examen. En tant qu’éducateurs, notre objectif est d’aider les étudiants à devenir des penseurs indépendants. Je ne veux pas que mes étudiants écrivent qu’ils acceptent l’évolution simplement pour réussir un examen. Je veux qu’ils démontrent l’argumentation sur laquelle ils se sont appuyés pour parvenir à leur conclusion, même si celle-ci rejette l’évolution humaine.

La connaissance est un cheminement

Sinon, je ferais ce que font ceux qui critiquent l’évolution : je leur imposerais une opinion. Mon objectif est d’apprendre aux étudiants à développer une méthodologie rationnelle pour évaluer le monde naturel et à formuler leurs propres opinions, hypothèses et théories, sans copier les autres.

Cela devient un appel à de nouvelles façons de penser : un cheminement vers la connaissance, qui est l’un des principes fondamentaux de l’islam. Si nous réussissons dans cette entreprise, nous contribuerons à la création d’une génération de scientifiques musulmans libres penseurs.  

Rana Dajani

Une réponse

  1.  » Penseurs libres  » ,  » libres – penseurs  » … tout cela me fait penser à Omar Khayyam ( Moyen Âge ) tenant des propos d’ une extrême gravité et très proches de la mécréance :  » referme ton Coran . Pense et regarde librement le ciel et la terre  » . Puisse l ‘ ensemble des Musulmans et bien entendu Raja Dajani éviter , par la Grâce d ‘ ALLAH , ce sentier glissant ( la libre – pensée) frayé et balisé , il faut le savoir , par les laïcs et les francs – maçons . Qui plus est , les occurrences des termes  » CRÉER  » ,  » CRÉATION  » , « CRÉATEUR  » sont vraiment légion sur l ‘ espace énonciatif Islamique . Tout doué de raison et de lumière se demande pourquoi les cailloux ( souche indépendante ) n ‘ ont jamais songé à évoluer pour donner des choux ( espèce créée indépendamment d ‘ autres espèces ) . Tout doué de jugeote trouve en cette récurrence du verbe CRÉER une véritable antithèse à la fallacieuse théorie dite de l ‘ évolution , un bel arsenal dressé contre les beaux mensonges darwiniens.

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