Converti à l’Islam dès l’âge de 15 ans, Az-Zubayr Ibn Al ‘Awwam est un compagnon de la première heure. De nature courageuse et sincère, il fut distingué par cette parole du Prophète ﷺ : « certes, chaque Prophète a un apôtre et le mien est Az-Zubayr ». Sa vaillance et sa fidélité lui éviteront de participer activement aux querelles intestines entre les compagnons durant la période de la Grande discorde.
Son nom est Az-Zubayr Ibn Al-Awwam Ibn Khuwaylid Ibn Asad Ibn ‘Abd Al-Uzza Ibn Qusayy Ibn Kilab. Il est le fils de Safiya Bint ‘Abd Al-Muttalib, l’une des tantes paternelles du messager de Dieu ﷺ et le neveu de Khadîja Bint Khuwaylid, la première épouse de celui-ci. Il est l’un des dix compagnons à qui le prophète a promis le Paradis de son vivant.
Né 28 ans avant l’Hégire, Az-Zubayr fut, à l’âge de 15 ans, l’un des tous premiers à embrasser l’Islam à La Mecque. Sa conversion se fit par l’entremise d’Abu Bakr. Zubayr eut plusieurs enfants dont les plus célèbre furent : son premier fils ‘Abd Allah, puis Urwa, Al-Mundhir, Hamza, Jaafar, Mus’ab et Khalid.
Persécution et émigration en Abyssinie
A la Mecque, bien avant l’exode à Médine, le prophète ﷺ établit les liens de fraternité entre ses compagnons, il les établit notamment entre Talha et Az-Zubayr. Une grande amitié naitra de cette consolidation fraternelle dont le prophète témoignera, par ces mots : « Talha et Az-Zubayr seront voisins au Paradis. ». En dépit de son rang honorable à la Mecque, dû à son clan, Az-Zubayr du faire face aux persécutions des arabes Qoraichites. C’est son propre oncle qui se chargea des supplices à infliger.
Ce dernier enroulait son neveu dans une natte de joncs qu’il entourait d’un feu fumant, asphyxiant. Puis il disait à son neveu : « Renie le seigneur de Mohammad, repousse donc ce supplice ». Mais, sans succès, Az-Zoubayr refusait. Certains chroniqueurs affirment que Zubayr fut notamment le premier à avoir tiré son épée pour la cause de l’Islam. Il la tira, durant la période mecquoise, après que lui fut parvenue la rumeur de l’assassinat du Prophète ﷺ.

Alors que les musulmans étaient très minoritaires et ne se rencontraient que secrètement dans la maison d’al-Arqam, Az-Zubyar sortit courageusement, sabre au poing, dans les rues de la Mecque. Il avait l’intention de faire usage de son arme dans le cas où l’information s’avèrerait vraie. Heureusement, il rencontra le Prophète, en chemin, et son cœur s’apaisa.
Par la suite, fuyant les persécutions, Az-Zubayr fit les deux émigrations d’Abyssinie, la première et la deuxième. Il revint à la Mecque, pour épouser Asma, la fille d’Abu Bakr, puis il émigra à Médine. Là-bas Asma mettra au monde le premier né musulman : ‘Abd Allah Ibn Az-Zubayr.
« Chaque Prophète a un apôtre et le mien est Az-Zubayr »
De l’Abyssinie, Az-Zubayr revint également pour prendre place, au côté du Prophète ﷺ, à la première bataille de l’Islam. Le jour du discernement (le jour de Badr), Zubayr était sur le flanc droit de l’armée et ce jour-là, il tua de nombreux opposants dont son propre oncle et tortionnaire : Nawfal Ibn Khuwaylid. La bataille d’Ouhoud a eu lieu en 625, lorsque les Mecquois lancèrent une attaque contre les musulmans à Médine pour venger leur défaite à Badr.
Zubayr rejoignit les rangs des musulmans et combattu avec bravoure lors de cette bataille difficile. Au moment du retrait inopportun des forces musulmanes, il fut parmi les rares à se tenir aux côtés du Prophète ﷺ. La vaillance, la sincérité et le courage d’Az-Zubayr lui vaudra des éloges du messager de Dieu qui le décrira, dans une tradition, comme son apôtre. Cette distinction intervint lors de la bataille des Coalisés (Khandaq) lorsque la tribu de Qoraich et leurs alliés vinrent à Médine afin de combattre les musulmans.

Alors que le Prophète ﷺ ordonna de creuser une tranchée, les musulmans furent informés que la tribu juive des Banî Qurayẓah avait rompu le pacte conclu auparavant avec eux et qu’elle s’était alliée avec Qoraich. Le Prophète demanda alors : « Qui pourrait me ramener des nouvelles des Banî Qurayẓah ? » Az-Zubayr ibn Al-‘Awwam se leva et répondit : « Moi, je t’apporterai de leurs nouvelles ! ». Puis, le Prophète réitéra sa demande à nouveau : « Qui pourrait me ramener des nouvelles des Banî Qurayẓah ? » Az-Zubayr répondit de nouveau : « Moi ! ». Alors, à cet instant, le Prophète ﷺ s’exclama : « Certes, chaque Prophète a un apôtre et le mien est Az-Zubayr ».
Un des compagnons, proche d’Az-Zubayr, témoigna : « J’ai accompagné Az-Zubayr Ibn al-Awam dans l’un de ses déplacements et j’ai vu son corps. Il était ondulé par les cicatrices causées par les coups d’épée. Quant aux coups directs des flèches et des épées, on dirait des trous profonds dans son corps. Je lui ai dit : « Par Dieu ! j’ai vu en ton corps ce que je n’ai vu chez aucun autre ». Zubayr répondit : « Par Dieu, toutes ces blessures, je ne les ai eues qu’avec le Messager de Dieu et pour la cause de Dieu. ».
Au sein de l’armée musulmane
Après le décès du messager de Dieu, le commandeur des croyants Abu Bakr insista pour envoyer Usama Ibn Zayd à Balqa (en Jordanie) pour exécuter la dernière volonté du Prophète ﷺ. Le calife nomma Az-Zubayr, ‘Umar Ibn Al-Khattab, et Khalid Ibn Al-Walid comme officiers sous la direction d’Usama. L’historien Tabari déclare que l’expédition fut couronnée de succès, et Usama ouvra ainsi la voie aux conquêtes musulmanes de la grande Syrie dans l’Empire byzantin.
Durant la bataille d’Al-Yarmouk, Zubayr fut à lui seul une armée. Quand il vit les soldats musulmans céder devant les troupes byzantines, il lança un takbir retentissant et fonça, seul sabre en main, droit dans les rangs ennemis, avant de revenir parmi ses combattants. Il fut notamment accompagné, dans cette bataille, par son fils ‘Abd Allah alors âgé de 12 ans. Durant le règne d’Umar, Az-Zubayr demeura un proche conseiller du calife et un commandant précieux de l’armée musulmane.
En 644, le calife ‘Umar, se sachant proche de la mort, choisit Az-Zubayr et cinq autres compagnons pour élire le prochain commandeur des croyants. Il intégra ainsi officiellement le Majlis Al-Shura (conseil consultatif) qui élira finalement ‘Othman Ibn Affan. De son côté, Zubayr donna personnellement son propre vote à ‘Ali Ibn Abi Talib. Plus tard, en l’an 27 de l’hégire, le nouveau calife envoya Zubayr, durant la conquête de l’Afrique du Nord, comme renfort pour combattre un groupe de 120 000 soldats issus des restes de l’empire byzantin.

L’attitude d’Az-Zubayr durant la Grande Discorde
Après l’assassinat de ‘Othman, en 656, une discorde voit le jour entre les compagnons quant à l’attitude à adopter face aux meurtriers. Sans moyen effectif et tout en condamnant fermement ce crime, ‘Ali, nouvellement élu calife, n’entreprit pas immédiatement de représailles ni n’appliqua le talion sur les coupables pour éviter un embrasement général de la communauté.
Cette attitude, et la suspension temporaire du Talion, suscita l’incompréhension d’une partie des compagnons, notamment Az-Zubayr, Talha, et ‘Aïsha, la troisième épouse du Prophète. A la tête de tout un groupe, ‘Aïsha, Talha et Az-Zubayr partent de La Mecque, où ils s’étaient concertés, pour la ville de Bassora, en Irak, afin d’appeler les gens à soutenir leur demande de l’application de la loi du talion sur les assassins d‘Othman.
Ce départ soudain de ces trois éminents personnages, pour l’Irak, suscita l’inquiétude d’Ali qui décida alors, avec l’objectif de clarifier les choses, d’aller, à la tête lui aussi d’un groupe, trouver les trois belligérants pour disperser les incompréhensions. Si les deux groupes sont sortis avec des lourds effectifs, nul n’a l’intention initialement d’en découdre avec l’autre. Arrivés sur les lieux, ‘Ali discute en aparté avec Az-Zubayr et lui rappelle un récit prophétique : “N’avais-tu pas entendu le Prophète ﷺ dire, alors que tu pliais ma main : « Tu le combattras alors qu’il sera dans son droit, puis il aura le dessus ? ».
Al-Zoubayr acquiesça et sortit aussitôt des rangs pour éviter de contredire la parole du Prophète ﷺ. Malheureusement, pendant la nuit, dans la confusion de la situation, des individus prirent l’initiative du déclenchement du conflit armé. C’est le début de la bataille dite “du Chameau” en référence à la présence d’Aïsha sur un chameau durant le combat. Elle eut lieu en l’an 36 de l’Hégire (657).

Désertion et assassinat
Alors qu’Az-Zubayr déserta le champ de bataille et fit halte à un endroit dit « Wâdî As-Sibâ » (« la vallée des bêtes féroces ») pour y prier, un homme nommé ‘Amr Ibn Jarmuz surgit par derrière et le poignarda à mort. Fier de son geste, le meurtrier se précipita chez ‘Ali lui annoncer la « bonne nouvelle » de son crime. A l’évocation de cette annonce, ‘Ali hurla et ordonna qu’on expulse Ibn Jarmuz du campement. Il déclara alors : « Annonce à celui qui a assassiné le fils de Safiya qu’il sera en Enfer ».
Puis, quand on lui présenta l’épée d’Az-Zubayr, il fondit en larmes et dit : « Par Allah c’est une épée dont le propriétaire a protégé de si nombreuses fois le Messager de Dieu ﷺ ». Az-Zubayr Ibn Al ‘Awwam fut assassiné le mois de Jumada 1er de l’an 36 de l’Hégire, a l’âge de soixante-six ou soixante-sept ans.
Au moment du dernier adieu, il dit à son fils ‘Abd Allah : « Si tu ne peux rendre une dette, demande l’aide de mon seigneur. » Son fils demanda : « De quel seigneur parles-tu ? » Il répondit : « Dieu, il est le meilleur seigneur et le meilleur soutien. » Par la suite, ‘Abd Allah dit : « Par Dieu ! à chaque fois que je me trouve confronté à une dette, je dis : « Ô seigneur d’Az-Zubayr! acquitte sa dette. » Alors, il l’acquitte ».
Les enfants d’Az-Zubayr Ibn Al-Awwam
‘Abd Allah Ibn Zubayr est l’enfant le plus célèbre d’Az-Zubayr. Il était le premier enfant des Muhajirun (les émigrants à Médine) qui est né après l’hégire. Il fut également célèbre pour sa résistance contre le clan des Omeyyades notamment contre Mouawiya puis contre son fils Yazid.

‘Abd Allah refusa de reconnaitre le pouvoir de Mouawiya et fut, lui-même, désigné émir des croyants à la Mecque, après avoir reçu l’allégeance des habitants du Hijaz, du Yémen, de Bassora, de Koufa, du Khourasan et d’une grande partie de la Syrie. Evidemment les Omeyyades s’y opposèrent avec acharnement jusqu’au jour où ‘Abd Al-Malik Ibn Marwan envoya Al-Hajjaj à la tête d’une armée afin d’assiéger la Mecque.
Après six mois de siège, et malgré l’abdication de la plupart de ses combattants, ‘Abd Allah Ibn Az-Zubayr livra son dernier combat alors qu’il était âge de soixante-dix ans. Au terme de l’affrontement, le tristement célèbre Al-Hajjaj lui coupa la tête et le crucifia.
Son frère Urwa Ibn Zubayr, né également à Médine durant le califat d’Othman, fit partie des sept juristes (fuqaha) qui ont formulé le fiqh de Médine à l’époque des élèves des compagnes (tabi’in). Urwa est mort vers 712 sur son domaine agricole près de Rabadha, à la périphérie de Médine.
Ibrahim Madras