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Tajuddin Rasdi : « Nous avons besoin du « véritable » islam, pas du sectarisme »

En Malaisie, la religion musulmane joue un rôle essentiel, tant dans la vie civile que politique. Des divergences sur la vision des rapports entre islam et multiculturalisme ne sont pas rares. Focus sur une chronique de Tajuddin Rasdi à propos d’une discussion critique sur la vision non inclusive de certains leaders islamiques engagés dans des formations politiques.

Lle président du parti PAS, Abdul Hadi Awang, a déclaré que le moment était venu pour la nation d’être gouvernée selon les véritables principes de l’islam. J’appuie pleinement cette déclaration. La gouvernance islamique exige magnanimité, sagesse et clarté morale – et non pas le point de vue de quelqu’un prisonnier d’une bulle nationaliste. L’islam défend le caractère sacré de la vie et la dignité de tous les êtres humains, sans distinction de race, de religion ou même de mode de vie.

Elle ne cautionne pas le fait de qualifier les non-musulmans d’« animaux » simplement en raison de leur façon de s’habiller — chose qu’un dirigeant d’un parti islamique a faite il n’y a pas si longtemps. De nombreuses communautés à travers le monde vivent avec un minimum de vêtements en raison de leur climat et de leurs traditions. En tant que musulman, je ne les considère pas comme des animaux. Leur mode de vie reflète simplement une adaptation, et non une défaillance morale.

Un véritable leader musulman est celui qui représente tout le monde, sans distinction de foi ou de croyance, et non celui qui règne sur un petit coin du monde avec une fausse piété et des illusions de grandeur. Comme l’écrivait l’imam al-Ghazali dans son œuvre majeure, « Ihya Ulumuddin », ce serait un péché pour les musulmans de recourir aux injures lorsqu’ils sont confrontés à des opinions dissidentes.

Deuxièmement, l’islam respecte la vérité sous toutes ses formes et ne saurait jamais permettre, excuser ou encourager la calomnie envers qui que ce soit. Dès lors, comment un parti prétendant défendre les valeurs islamiques peut-il dénigrer les non-musulmans simplement parce qu’ils ont des visions du monde ou des idéologies politiques différentes ?

Quel message envoie-t-on lorsqu’une campagne de dons pour un dirigeant reconnu coupable de diffamation est qualifiée de « djihad » ?

Les musulmans doivent se souvenir qu’Abu Talib — l’oncle du prophète Mahomet — bien que n’étant pas musulman, a protégé le Prophète sans relâche jusqu’à son dernier souffle. Ils doivent également se souvenir que Waraqah bin Naufal, un chrétien, fut le premier à déclarer Muhammad prophète, affirmant qu’il avait réellement rencontré l’archange Gabriel, un messager d’Allah.

Les musulmans doivent également se souvenir de l’histoire de Bahira, un moine chrétien qui conseilla à Abou Talib de rester vigilant pour protéger son jeune protégé face aux menaces de mort dont il était victime en raison de ses idées politico-religieuses.

Il ne faut pas non plus oublier Négus, le roi chrétien d’Abyssinie, qui a risqué son trône pour protéger héroïquement les premiers immigrants musulmans fuyant les persécutions à La Mecque. Sans sa protection, les persécuteurs quraychites auraient probablement massacré les membres vulnérables de la première communauté musulmane, en particulier les femmes, les enfants, les personnes âgées et les jeunes.

Enfin, il convient également de rappeler que les Ansar, les habitants autochtones de Médine qui ont accueilli le prophète Mahomet comme chef et arbitre des factions belligérantes de la ville, comprenaient des juifs, des chrétiens et des non-croyants. En effet, l’islam respecte et valorise toute l’humanité, et non seulement les musulmans ou les membres d’un soi-disant parti islamique.

Troisièmement, l’islam est une religion et un mode de vie qui évoluent au gré des progrès des idées, de la pensée et de la technologie.Dans un discours prononcé en 2018, le grand penseur, spiritualiste, éducateur et dirigeant politique malais Siddiq Fadzil, ancien président du Mouvement islamique de la jeunesse malaisienne (Abim), a utilisé le mot « ukhwah » (fraternité) en évoquant les liens avec les non-musulmans. Ce mot est traditionnellement utilisé pour décrire le lien sacré qui unit les musulmans.

Dans ce même discours, Siddiq, père de l’actuel ministre de l’Éducation, a déconseillé l’utilisation du terme « kafir harbi » pour décrire les citoyens non musulmans de notre pays. Plusieurs années après sa mort en 2021, un parti se réclamant de l’islam a qualifié de « kafir » les non-musulmans d’un autre parti politique. Dans leur déclaration Qunut Nazilah, ce même parti, pourtant très islamique, a même qualifié les députés hors de son alliance et d’autres Malaisiens d’« ennemis de l’islam ».

L’islam respecte tous les hommes, quelles que soient leur culture et leur religion. En temps de paix, il est permis aux musulmans de collaborer ou de conclure des accords avec des non-musulmans. Dans ces conditions, il est triste de voir certains politiciens, inspirés par la religion, insinuer que l’on ne peut faire confiance aux non-musulmans. Par exemple, lorsque des non-musulmans commettent une erreur en arborant le Jalur Gemilang, ils sont traités de « traîtres ».

Certains dirigeants de ce parti ont également insinué que les Malaisiens non musulmans étaient des ennemis de l’État, simplement parce qu’ils participaient à des célébrations honorant les liens historiques de la Malaisie avec la Chine, un partenaire commercial clé aujourd’hui et un ancien protecteur du sultanat de Melaka contre le royaume de Siam.

En conclusion, je réaffirme mon accord total avec Hadi, qui fut une source d’inspiration profonde durant mes débuts dans la réforme islamique et tout au long de l’ère « Reformasi » d’Anwar Ibrahim.

L’islam demeure, à mon sens, l’une des idéologies les plus vitales et transformatrices de l’humanité. C’est une bonne chose que Hadi ait déclaré que le véritable islam représente l’avenir de la politique, tant au niveau national que mondial.

Nous attendons donc de son parti qu’il incarne l’esprit de l’islam tel qu’il a été introduit et propagé par le prophète Mahomet — un esprit enraciné dans les valeurs démocratiques et l’inclusion multiculturelle. Non pas un islam raciste, sectaire et exclusif, mais un islam qui reconnaît la dignité de toutes les races, cultures et confessions.

Tajuddin Rasdi

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