La guerre qui dévaste le Soudan, depuis plus de deux ans, connaît une escalade dramatique au Darfour. Alors que la situation humanitaire se détériore, une frappe de drones menée par les Forces de soutien rapide (FSR) a récemment visé une mosquée et des habitations à El Fasher, tuant au moins 75 fidèles, dont plusieurs enfants. L’ONU dénonce un crime de guerre.
Les humanitaires des Nations Unies alertent sur une aggravation dramatique de la crise à El-Fasher, capitale du Darfour-Nord. La Mission d’enquête internationale indépendante de l’ONU sur le Soudan a notamment condamné, mercredi, la frappe du 19 septembre contre une mosquée d’El Fasher, “constituant une violation grave des lois de la guerre qui pourrait s’apparenter à un crime de guerre”.
Un mépris flagrant du droit international
« Les attaques meurtrières et les déplacements aggravent les souffrances des civils », a souligné lundi le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), ajoutant que « la violence a un impact dévastateur sur les efforts d’aide humanitaire ».
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a indiqué qu’environ 7 500 personnes avaient fui la semaine dernière le camp de déplacés d’Abou Shouk, en périphérie d’El-Fasher, ainsi que plusieurs quartiers de la ville, en raison de l’insécurité persistante. Les enquêteurs de l’ONU ont aussi condamné “avec la plus grande fermeté” une frappe par drone attribuée aux Forces de soutien rapide (FSR) contre la mosquée Al-Safiya et des habitations voisines.
L’attaque a tué 75 fidèles, dont une dizaine d’enfants. « Tuer des civils, y compris des enfants, en pleine prière dans une mosquée témoigne d’un mépris flagrant du droit international », a affirmé Mohamed Chande Othman, Président de la Mission d’établissement des faits.
La ville d'El Fasher, au #Soudan 🇸🇩, est assiégée par le groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide qui tente de prendre la ville sous le contrôle de l'armée soudanaise.
— Le Journal de l'Afrique – France 24 (@JTAfrique) September 10, 2025
Des rescapés ayant réussi à fuir la capitale du Nord-Darfour racontent leur calvaire ⤵️ pic.twitter.com/RNJTrfxirW
El-Fasher est au bord du gouffre
Les enquêteurs rappellent que cibler délibérément des sites religieux ou culturels constitue une violation flagrante du droit international humanitaire. « Le fait de viser intentionnellement des bâtiments dédiés à la religion, à l’éducation, à l’art, à la science ou à des fins caritatives, ainsi que des monuments historiques, constitue un crime de guerre, à condition que ces lieux ne servent pas d’objectifs militaires », insiste la Mission.
Le secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, Tom Fletcher, a récemment averti qu’El-Fasher était au bord du gouffre, ses habitants survivant dans des conditions proches de la famine. Il a appelé à cesser les combats entre les FSR et l’armée soudanaise, rappelant l’urgence de protéger les civils et de permettre l’accès de l’aide.
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Vers une nouvelle partition du Soudan ?
Les FSR, dirigées par Mohamed Hamdan Daglo, dominent déjà le sud du pays et la majeure partie du Darfour, où elles ont installé une administration parallèle. El-Fasher, dernier bastion de l’armée au Darfour-Nord, est sur le point de tomber. Selon plusieurs analystes, le pays risque de se fragmenter davantage, après la sécession du Soudan du Sud en 2011.
Depuis avril 2023, la guerre a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé des millions de personnes, provoquant la “pire crise humanitaire” actuelle selon l’ONU.