Suite aux licenciements, au sein des hôpitaux de Paris (AP-HP), d’infirmières et d’aides-soignantes musulmanes en raison du port d’une charlotte, assimilée à un « signe religieux par destination », le Conseil français du culte musulman (CFCM) a annoncé hier avoir saisi le Défenseur des droits.
À la suite de la publication, en 2023, d’un Guide de la laïcité par l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), interdisant « le port d’une charlotte de bloc opératoire, en dehors des situations dans lesquelles elle est requise », plusieurs femmes musulmanes, ou perçues comme telles, auraient été radiées des établissements hospitaliers. Face à des mesures jugées « disproportionnées et injustifiées », le CFCM a annoncé ce jeudi, dans un communiqué, avoir saisi le Défenseur des droits.
Des décisions « disproportionnées et injustifiées »
Dans ce texte rendu public jeudi, le CFCM indique avoir été informé que plusieurs femmes, musulmanes ou « supposées comme telle« , auraient fait l’objet de radiations au sein des hôpitaux de l’AP-HP en raison du port d’une charlotte, considérée par leur hiérarchie comme un « signe religieux par destination ». L’instance dénonce des décisions qualifiées de « disproportionnées et injustifiées », aux conséquences jugées « particulièrement graves ».
Elle pointe la rédaction « vague » et l’application « sans encadrement précis » du Guide de la laïcité publié par l’AP-HP en 2023, qui précise : « Le port d’une charlotte de bloc opératoire, en dehors des situations dans lesquelles elle est requise pour les besoins du service, peut constituer l’expression d’une appartenance religieuse et, ainsi, un comportement professionnel fautif. »
Selon le CFCM, cette formulation crée une insécurité juridique susceptible d’aboutir à des décisions incohérentes, « voire absurdes ». L’organisation y voit un « détournement inacceptable du principe de laïcité ».

Un climat de suspicion envers les infirmières supposées musulmanes
« Cette disposition, qui engendre un climat de suspicion inacceptable, conduit à une situation profondément choquante : une infirmière supposée musulmane ne pourrait porter sereinement un calot sans s’exposer à une sanction disciplinaire grave, tandis qu’une collègue perçue comme “non musulmane” pourrait porter le même couvre-chef sans difficulté », déplore l’instance musulmane.
Pour le CFCM, le motif de licenciement avancé par l’AP-HP, fondé sur la notion de « signe religieux par destination », ne saurait « être étendu au port d’un calot en milieu hospitalier », celui-ci « n’étant ni un vêtement extérieur ni un accessoire distinctif, mais un élément vestimentaire usuel et commun à l’environnement hospitalier ».
« Comment l’autorité hiérarchique est-elle censée établir l’existence d’une “volonté d’expression religieuse” ? Le seul fait de l’appartenance réelle ou supposée à la confession musulmane peut-il suffire à caractériser une telle volonté ? »
Les demandes du CFCM
En conséquence, « au regard du préjudice subi par les femmes concernées », le CFCM annonce avoir saisi le Défenseur des droits « afin de demander le retrait immédiat du passage litigieux du Guide de la laïcité de l’AP-HP ».
Plus largement, l’instance appelle « les plus hautes autorités administratives » à l’ouverture d’une enquête administrative transparente sur le nombre de personnes concernées par ces radiations, ainsi qu’à la modification du passage contesté du Guide de la laïcité de l’AP-HP, afin de mettre fin à toute ambiguïté source de confusion, d’insécurité juridique et de risques élevés de décisions arbitraires.
