Des responsables musulmans et acteurs associatifs ont adressé, ce mercredi, une lettre au président du Sénat pour faire part de leur « lassitude » face à la « stigmatisation » des Français de confession musulmane. Ils dénoncent les mesures du rapport sénatorial vécues « comme des attaques directes contre leurs libertés fondamentales ».
Des responsables du culte musulman et responsables associatifs ont écrit mercredi une lettre ouverte au président du Sénat pour faire part de leur « ras-le-bol » face à un énième rapport « tristement familier », décrit comme une « instrumentalisation politique systématique de leur pratique cultuelle ».
Des mesures stigmatisantes « vécues comme des attaques »
Interdiction du voile et du jeûne avant 16 ans, bannissement du voile dans le sport, sanctions financières contre les parents… Les sénateurs Les Républicains (LR) ont proposé, dans un rapport, une série de mesures discriminantes censées combattre « l’entrisme islamiste ».
Des acteurs du culte musulman, dont plusieurs membres du Forum de l’islam de France (Forif), ont ainsi exprimé mercredi leur « lassitude » dans une lettre adressée au président du Sénat, Gérard Larcher. Ils dénoncent des propositions « vécues comme des attaques » et un « une parole de stigmatisation qui se banalise ».
« Cet énième rapport s’inscrit dans une séquence devenue tristement familière pour les millions de citoyens français de confession musulmane, celle d’une instrumentalisation politique systématique de leur pratique cultuelle. »
Lettre ouverte au président du Sénat par des représentants associatifs musulmans.
— #MN (@MNBK92) November 26, 2025
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« Nous le disons clairement : nous en avons assez »
« Ces dernières années, et de manière particulièrement intense ces derniers mois, l’espace public est saturé par une surenchère de publications sensationnalistes, de rapports approximatifs, d’enquêtes manifestement biaisées et de sondages réducteurs », déplorent les signataires.
Ils déclarent, dans leur tribune, leur « ras-le-bol généralisé » face à « un nouveau sujet anxiogène destiné à faire de millions de citoyens français musulmans un problème ». Les signataires se disent « lassés » de voir la foi et les pratiques religieuses musulmanes « servir de variable d’ajustement dans des stratégies électorales cyniques ».
« Les conclusions de cette commission ne sont pas perçues par les citoyens musulmans comme des mesures de protection, mais bien comme des attaques directes contre leurs libertés fondamentales et leur place dans la société. »
Un appel à la responsabilité collective »
Pour les auteurs de la lettre, les conclusions de cette commission dénaturent les principes laïques de la loi de 1905 et « franchissent une limite claire : elles instaurent une ingérence inédite dans la pratique du culte et dans l’interprétation de la doctrine ».
Déplorant que « peu d’acteurs religieux ou institutionnels réellement compétents aient été consultés », la tribune fustige également la composition des auditions, comprenant « plusieurs intervenants notoirement éloignés du terrain, voire ouvertement hostiles à l’islam et aux musulmans ».
Les signataires appellent enfin « à un sursaut » et à la « responsabilité collective ». Ils demandent au président du Sénat (et aux sénateurs) de « respecter strictement la laïcité dans son esprit originel », de « travailler avec les acteurs légitimes du culte musulman », de s’appuyer « sur des données factuelles » et de « cesser d’instrumentaliser les musulmans ».
Parmi les premiers signataires de la tribune :
Najat Benali (Coordination des associations musulmanes de Paris)
Bassirou Camara (Association de défense contre les discriminations et les actes antimusulmans)
Mohamed Ould Kerroubi (Conseil des Institutions musulmanes des Yvelines)
Abdenour Bastianelli (Conseil national des aumôneries musulmanes)
Mamadou Daffé, Coordination des mosquées de l’agglomération toulousaine
Abdelaziz Abderrahmane, Rassemblement des associations musulmanes de Seine-et-Marne
Aboubakar Barry, Fédération musulmane du Tarn (FMT 81)
Karim Benaissa, Rassemblement des associations musulmanes du Val-de-Marne (RAM 94)
Mohamed Abachri, Conseil départemental du culte musulman (CDCM 37)
Ali Essebki, Union des mosquées des Hauts-de-Seine (UM92)
Nazir Patel, Conseil du culte musulman de la Réunion
Abdenour Bastianelli, Conseil national des aumôneries musulmanes (CNAM France)
Assani Fassassi, Fédération française des associations islamiques d’Afrique des Comores & des Antilles
Sadek Beloucif, professeur des universités, praticien hospitalier, Association L’Islam au XXIe siècle
Omero Marongiu-Perria, sociologue et administrateur du CNAM France
Mohamed El Mahdi Krabch, aumônier, membre de l’Université populaire de Nîmes (Gard)
Abobikrine Diop, Mosquée Bilal de Marseille (Bouches-du-Rhône)
Mohamed Hicham Joudat, Grande Mosquée de Metz (Moselle)
Abdelghani Benali, Rassemblement des associations musulmanes de Seine-Saint-Denis (RAM 93).
