À l’heure où la planète fait face à des bouleversements environnementaux sans précédent, de nombreuses voix se tournent vers les traditions religieuses pour éclairer nos comportements. Parmi elles, l’islam – l’une des confessions les plus dynamiques et influentes à l’échelle mondiale – offre un regard riche et inspirant sur notre rapport au vivant. Exemple avec le cas indonésien.
Les préceptes de l’islam invitent les croyants à se concevoir comme des khalīfah, c’est-à-dire des gardiens de la Terre explique Caroline Nourry dans un article sur la question écologique en islam (The Conversation). Cette vision religieuse, souligne-t-elle, place l’être humain dans une position de responsabilité envers l’ensemble de la création : les personnes, les animaux, les plantes et les écosystèmes. Protéger l’environnement devient ainsi un acte de dévotion, une manière d’honorer le divin.
Le Coran, texte sacré de l’islam, tout comme le hadith, regorgent de références à la nature : ciels étoilés, rivières, forêts et faune y sont dépeints avec admiration. Il invite les croyants à rechercher sans cesse la juste mesure – le mīzān – dans leurs actions, pour ne pas rompre l’équilibre naturel.
La naissance d’un mouvement : l’Islam vert
Si ces enseignements sont anciens, leur mobilisation collective autour de l’écologie est bien plus récente. « Le penseur musulman Seyyed Hossein Nasr fut l’un des premiers à formuler cette idée, écrit Caroline Nourry. À la fin des années 1960, il affirmait que les problèmes environnementaux n’étaient pas seulement physiques, mais aussi spirituels et moraux. Il était convaincu que chacun, quelle que soit sa foi, devait renouer avec des valeurs spirituelles qui enseignent la bienveillance et l’équilibre. »
Peu à peu, face à l’aggravation des dérèglements planétaires, de nombreux croyants et leaders musulmans ont revendiqué une approche environnementale ancrée dans leur foi. Depuis environ vingt-cinq ans, ce mouvement a pris une ampleur concrète : l’« Islam vert » dépasse désormais le cadre théorique pour inspirer des actions tangibles un peu partout dans le monde.
L’Indonésie, en première ligne
Pays musulman le plus peuplé au monde, l’Indonésie est aussi en première ligne face à des défis écologiques majeurs : déforestation, pollution de l’air et des océans, émissions de gaz à effet de serre importantes. C’est dans ce contexte que le mouvement de l’Islam vert y a pris une envergure remarquable.
Les pesantren, internats islamiques très respectés, intègrent désormais l’éducation à l’environnement via le programme « Pesantren Hijau ». Leur influence au sein des communautés en fait des relais essentiels pour diffuser les bonnes pratiques.
La mosquée Istiqlal, la plus grande d’Indonésie, est devenue un symbole de cet engagement : première mosquée au monde à obtenir une certification environnementale, elle est équipée de panneaux solaires, d’un système de récupération des eaux et d’éclairages basse consommation. Son grand imam souligne que ces efforts honorent la tradition prophétique qui insistait sur la protection de la nature.
Les autorités religieuses et gouvernementales encouragent également les imams à aborder les questions écologiques dans leurs prêches, notamment lors d’occasions symboliques comme le Jour de la Terre.
Mais l’Indonésie n’est pas un cas isolé. Au Maroc, des mosquées deviennent « vertes » ; en Égypte, une fatwa a interdit les actions portant atteinte à l’environnement. Partout, la finance islamique durable – via les « Sukuk verts » – soutient des projets respectueux de la planète.
Sagesses convergentes pour une planète en péril
Alors que les défis environnementaux s’aggravent, toutes les traditions – religieuses ou non – sont conviées à apporter leur pierre à l’édifice, écrit Caroline Nourry. « À une époque où les défis écologiques sont croissants, toutes les sources de sagesse sont essentielles. Les enseignements de l’islam, ainsi que ceux des autres religions, offrent des conseils pour vivre en harmonie avec la nature. Ensemble, ils peuvent inspirer des actions concrètes et significatives pour la planète. »
