L’Institut européen des sciences humaines (IESH) de Château-Chinon, dissous par décret cet été, a annoncé mardi qu’il saisirait le Conseil d’État pour contester cette décision. Lors d’une conférence de presse, la direction et sa défense ont dénoncé la « tartine multicouche d’accusations » du décret ministériel de dissolution et présenté, au public, « un aperçu de ce qu’était l’institut ».
L’Institut européen des sciences humaines (IESH) de Château-Chinon a annoncé, lors d’une conférence de presse ce mardi, qu’il saisirait le Conseil d’État pour contester sa dissolution administrative, prononcée en conseil des ministres début septembre. L’établissement privé de formation d’imams et d’enseignement de l’arabe, basé dans la Nièvre, est l’un des plus connus en France. Il a été dissous le 3 septembre par décret ministériel.
Une volonté de déconstruction des institutions musulmanes
En juin 2025, l’IESH avait reçu une notification de dissolution, peu après la publication d’un rapport sur « les Frères musulmans et l’islamisme politique », où il était plusieurs fois cité. « Il y a une volonté, en France, de déconstruction des institutions musulmanes qui fonctionnent », a affirmé l’avocat Sefen Guez Guez, dans une conférence de presse, ce mardi, en banlieue parisienne.
« Le décret de dissolution repose sur deux motifs selon le gouvernement : l’incitation à la haine et la provocation au terrorisme. Nous avons répondu à tous ces points en produisant les fascicules de formation, des témoignages, des attestations, le contenu des cours. »
Dans un mémoire de 29 pages et plus d’une centaine d’annexes, l’établissement a répondu point par point au décret. « Je me demande si, dans ce document transmis au Conseil des ministres, certains ont ne serait-ce que lu deux pages… », s’est interrogé Larabi Becheri, ancien doyen de l’IESH.

« Nous sommes dans un agenda politique »
Pour l’avocat, la décision était « déjà prise » avant même la procédure contradictoire, « parce que nous sommes dans un agenda politique ». Durant la conférence, l’IESH a voulu reprendre la parole médiatique et offrir un « aperçu de ce qu’était l’institut » grâce à des témoignages d’anciens élèves.
« L’IESH a été cette boussole qui m’a permis de construire une identité à la fois française, parce que je suis fier d’être français, n’en déplaise à certains, (…) et musulmane », a confié un étudiant. Le père Michel de Gigord, enseignant du catholicisme depuis 2019, a exprimé son « immense tristesse » de voir l’IESH disparaître.
« J’ai la conviction, hélas, que cette posture gouvernementale est extrêmement dangereuse, car écarter l’islam du dialogue laisse la voie libre aux fanatiques et fait le jeu de l’extrême droite », a déploré Yvonne Bercher, docteur en droit à l’Université de Lausanne.
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Se défendre face à « un bulldozer administratif »
Pour Yvonne Bercher, « la manière dont un pays traite ses minorités nous renseigne sur son degré de civilisation ». En conclusion, Larabi Becheri a dénoncé une « tartine multicouche d’accusations » et l’impossibilité de se défendre face à « un bulldozer administratif ». « Vous voulez connaître l’institut ? Il faut inverser tout ce que dit le décret. L’institut a toujours été un rempart contre le radicalisme. », a t-il ajouté.