« Pour la première fois en près de deux ans de génocide, Israël et le Hamas sont confrontés à des options imposées de plus en plus restreintes ». Dans un texte, publié sur Middle East Monitor, l’universitaire Ali Azmat décortique les derniers développements autour du plan de Trump pour Gaza accepté, avec réticence, par les deux parties concernées : Israël et l’organisation Palestinienne du Hamas.
Après de deux ans de génocide israélien à Gaza, un développement soudain et surprenant est survenu. L’organisation palestinienne du Hamas a publié, la semaine dernière, une déclaration acceptant le principe de la libération de tous les prisonniers israéliens qu’il détient – vivants et morts – et de la remise de l’administration de Gaza à un organisme technocratique indépendant palestinien.
Cette concession faisait suite au plan de paix en 20 points du président américain Donald Trump, dévoilé à Washington aux côtés du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. La réponse du Hamas a donc été prudemment affirmative. « Le mouvement annonce son approbation de la libération de tous les prisonniers d’occupation selon la formule d’échange contenue dans la proposition du président Trump, avec les conditions de terrain nécessaires à sa mise en œuvre », a-t-il déclaré.
Donald Trump a salué cette décision, se félicitant du bien-fondé de sa démarche. « Sur la base de la déclaration que vient de publier le Hamas, je crois qu’il est prêt à une paix durable. Israël doit immédiatement cesser de bombarder Gaza, afin que nous puissions libérer les otages rapidement et en toute sécurité ! Pour l’instant, c’est bien trop dangereux. Nous discutons déjà des détails à régler. Il ne s’agit pas seulement de Gaza ; il s’agit de la paix tant recherchée au Moyen-Orient. »

Le double discours de Netanyahou
Pour la première fois en près de deux ans de génocide, Israël et le Hamas sont confrontés à des options imposées de plus en plus restreintes. Aucun des deux ne peut rejeter catégoriquement la proposition de Trump sans encourir de coûts. Les familles de détenus israéliens, longtemps désespérées, voient dans les derniers développements une lueur d’espoir.
Les Palestiniens de Gaza, qui endurent d’immenses souffrances, voient la possibilité d’une trêve dans les bombardements. Des médiateurs internationaux, dont le Qatar et l’Égypte, travaillent déjà à l’élaboration de mécanismes de mise en œuvre. Après l’approbation du Hamas, le cabinet du Premier ministre Netanyahou a publié un communiqué : « À la lumière de la réponse du Hamas, Israël se prépare à mettre en œuvre immédiatement la première phase du plan Trump pour la libération immédiate de tous les otages. »
Devant un public israélien, Netanyahou a toutefois tempéré sa déclaration en affirmant qu’il n’avait pas accepté la création d’un État palestinien et insistant sur le maintien des forces israéliennes dans la majeure partie de Gaza. Entre-temps, les bombardements israéliens sur Gaza se sont poursuivis, malgré l’appel au cessez-le-feu de Donald Trump. Au moins 94 Palestiniens ont été tués en 48 heures, selon des sources médicales.
La réticence du Hamas sur deux clauses du plan
Trois problèmes se démarquent comme étant des facteurs potentiellement rédhibitoires : Le premier point concerne le séquençage. Trump a exigé la libération rapide des détenus israéliens, dans un délai de 72 heures, dans le cadre d’une suspension des opérations militaires israéliennes. Mais qui surveillera le cessez-le-feu ? Qui garantira un passage sûr dans une zone de guerre active ? Sans clarté, même de multiples violations pourraient compromettre le processus.

Deuxièmement, la gouvernance. Le Hamas a réitéré : « Le mouvement réaffirme également son accord pour confier l’administration de la bande de Gaza à un organisme palestinien indépendant (technocrates), fondé sur le consensus national palestinien et bénéficiant du soutien arabe et islamique. »
L’idée de Trump d’un « Conseil de la paix » externe composé de personnalités internationales a été catégoriquement rejetée. « Nous n’accepterons jamais que quiconque ne soit pas Palestinien contrôle les Palestiniens », a déclaré à Al Jazeera Mousa Abu Marzouk, responsable du Hamas, ajoutant que la nomination de Tony Blair serait particulièrement malvenue en raison de son rôle dans la guerre en Irak. La tension entre contrôle externe et légitimité interne reste entière.
Troisièmement, le désarmement. Le plan de paix en 20 points de Trump prévoit la démilitarisation du Hamas et des autres factions et leur exclusion de tout rôle dans la gouvernance de Gaza. Pour Netanyahou et ses alliés, le Hamas doit être démuni de sa capacité militaire. Pourtant, la déclaration du Hamas ne fait aucune référence au désarmement, laissant la question à débattre ultérieurement. Pour le groupe, notent les observateurs, rendre les armes sans garanties politiques équivaudrait à une capitulation.
Une cessez-le-feu sans responsable ni justice
Le bilan humanitaire constitue le contexte dramatique de ces manœuvres. Selon les autorités sanitaires de Gaza, plus de 67 000 Palestiniens ont été tués depuis octobre 2023, des dizaines de milliers d’autres ont été blessés et des déplacements massifs de population ont eu lieu sur tout le territoire.

Des groupes de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, des organisations israéliennes comme B’Tselem et Physicians for Human Rights ainsi que le Conseil des droits de l’homme de l’ONU ont accusé Israël de crimes contre l’humanité et de génocide. Le plan de Trump, cependant, reste muet sur la question de la responsabilité des ravages causés à Gaza. Il promet des fonds pour la reconstruction et un territoire « réaménagé », mais évite de nommer les responsables de la destruction.
Les critiques avertissent qu’une reconstruction sans justice risque de consolider le contrôle plutôt que d’instaurer la paix. Comme l’a inlassablement répété Mahmoud Abbas, “président” de l’Autorité palestinienne : « Nous sommes un peuple sous occupation et nos droits sont inaliénables. La paix sans nos droits n’est pas une paix ».
Véritable avancée ou nouvelle aube illusoire ?
Malgré ses imperfections, l’échange de déclarations entre Trump et le Hamas a transformé le paysage politique. Le Hamas a approuvé la libération des prisonniers et le transfert du pouvoir à un organisme palestinien indépendant fondé sur le consensus. Trump a exigé qu’Israël cesse ses bombardements afin de permettre la conclusion d’un plan de paix. Netanyahou, sous la pression de toutes parts, a accepté de coopérer à l’initiative de Trump.
Il serait prématuré de parler d’un tournant. Qu’il s’agisse d’une véritable avancée ou d’une nouvelle fausse aube dépend des jours à venir. Si les détenus israéliens sont rendus, les bombardements suspendus et une administration neutre commence à se former, la trajectoire du génocide israélien pourrait changer. Dans le cas contraire, le génocide reprendra et la violence israélienne pourrait s’intensifier.
Azmat Ali