Plusieurs cadres politiques français agitent, depuis plusieurs mois, la menace fantasmée d’une « infiltration frériste » pour les élections municipales de 2026. Mardi, le ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez, a évoqué la création possible d’un délit « d’atteinte à la cohésion nationale ». Le lendemain, Bruno Retailleau a déclaré vouloir déposer une loi contre « l’entrisme municipal ».
Sur le plateau de Public Sénat, au salon des maires de France, l’ancien ministre Bruno Retailleau a annoncé, mercredi, qu’il déposera prochainement deux propositions de loi pour lutter contre « l’islamisme », dont l’une concernant la lutte contre « l’entrisme municipal ». Sur une ligne similaire, l’actuel ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez, a évoqué mardi la possibilité de créer un délit « d’atteinte à la cohésion nationale ».
Rendre des organisations inéligibles
De retour au Sénat après un an place Beauvau, Bruno Retailleau était présent au salon des maires de France, ce mercredi. Sur le plateau de Public Sénat, il participait à un débat sur « la montée du narcotrafic en France » face au maire écologiste de Grenoble, Éric Piolle.
L’ancien ministre a ainsi réagi au récent sondage controversé de l’IFOP sur les rapports des musulmans de France avec l’islam et l’islamisme : « C’est terrible […] C’est la victoire du frérisme, des Frères musulmans », a-t-il commenté. Le sénateur en a profité pour annoncer qu’il déposera prochainement deux propositions de loi pour lutter contre « l’islamisme ».
« Je propose qu’on puisse dissoudre (une organisation) lorsqu’il y a une atteinte à la forme démocratique et républicaine de notre organisation institutionnelle. Et deuxièmement, pour lutter contre l’entrisme municipal, celles et ceux qui auront été convaincus par une décision de justice d’avoir soutenu ce type d’organisation deviendraient inéligibles. »
« Je propose qu’on puisse dissoudre (une organisation) lorsqu’il y a une atteinte à la forme démocratique et républicaine de notre organisation institutionnelle. Et deuxièmement pour lutter contre l’entrisme municipal, celles et ceux qui auront été convaincus par une décision de… pic.twitter.com/Y5xdKrOUU0
— Public Sénat (@publicsenat) November 20, 2025
Une marge juridique répressive élargie
Même discours du côté de l’actuel ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez, qui a évoqué mardi devant la commission d’enquête « sur les liens existants entre les représentants de mouvements politiques et des réseaux propageant l’idéologie islamiste », plusieurs thèmes sur lesquels légiférer.
« Il faut donner davantage d’agilité aux services de renseignement, disposer de possibilités d’incrimination pénale et avoir la possibilité de dissoudre des structures », a-t-il suggéré, allant jusqu’à réclamer de nouvelles bases légales pour permettre le « gel des avoirs pour des agissements liés à ces motifs de dissolution » et ouvrir la porte à des mesures comme le blocage des permis de construire de lieux de culte « via un avis conforme du préfet ».
En ce sens, le ministre de l’intérieur a évoqué aussi la possibilité de créer un délit « d’atteinte à la cohésion nationale », sans y apporter une définition claire et explicite, laissant ainsi, une nouvelle fois, toute la marge juridique répressive possible sur les citoyens de confession musulmane.
Le rapport commandé par l’ancien ministre de l’Intérieur (Darmanin) a alimenté tous les fantasmes d’un Conseil de défense animé par Emmanuel Macron autour de l’entrisme supposé des Frères musulmans en France. Une publicité qui masque mal les contradictions d’un rapport consulté… pic.twitter.com/MvsgcML7Ci
— Mizane.info (@MizaneInfo) May 22, 2025
Une menace théorique et fantasmée
L’entrisme supposé des « Frères musulmans » pour les municipales de 2026 est une menace fantasmée agitée depuis plusieurs mois par certains responsables politiques en France. En mai dernier, sur le Figaro TV, Bruno Retailleau estimait déjà qu’à l’horizon 2026, « les Fréristes pourraient profiter des élections pour imposer leurs idées et leurs candidats”.
« On parvient à contenir l’entrisme, mais l’an prochain, il risque d’y avoir des entrées dans les listes municipales avec ce discours : “Si vous nous prenez, nous apporterons un paquet de voix” », assurait l’ancien ministre.
Une hypothèse reprise du controversé rapport « Frères musulmans et islamisme politique en France », qui accordait une attention particulière aux collectivités et évoquait un entrisme local de la confrérie via une stratégie d’influence qualifiée d’« islamisme municipal ».
