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7 octobre : le monde n’a pas détourné les yeux de Gaza, la résistante

Pour la journaliste américaine, Jenny Williams, deux ans après le 7 octobre 2023, malgré le détournement du regard des dirigeants, Gaza continue de résister « et la rue, elle, ne baisse pas les yeux ». « Au-delà du terrain de guerre, une autre bataille s’est déroulée. Le monde n’est pas resté silencieux : les citoyens ordinaires ont tenté ce que les institutions ont refusé. Voilà à quoi ressemble le sumud – la résilience – en 2025 ». 

Deux ans après le 7 octobre 2023, Gaza demeure la plaie la plus vive de la région et le test le plus flagrant pour savoir si le droit international a encore une marge de pouvoir lorsque des civils se trouvent en première ligne. Le front ne se limite plus à une petite bande côtière. Il traverse des ports et des parlements, des tribunaux et des campus, et même les Nations Unies, où le décalage entre les déclarations solennelles et les actes a contraint les familles à composer avec la faim, le froid et la peur. 

La diplomatie du cessez-le-feu reprend en Égypte. L’ordre du jour est coutumier du fait : fin des bombardements, échanges de prisonniers, retraits progressifs et accès réel à l’aide humanitaire. Les négociateurs disent ressentir une dynamique. Les habitants de Khan Younis et de Deir Al-Balah y croiront lorsque l’eau coulera à nouveau des robinets, lorsque les boulangeries rouvriront, lorsqu’un enfant pourra dormir à l’intérieur sans compter les secondes entre les frappes. Chaque cycle de négociations commence et se termine avec des personnes qui ont besoin de certitudes, pas de slogans. 

Manifestation en Europe

Le monde n’est pas resté silencieux

À Gaza, le discours sur le « risque de famine » a cédé la place à la sombre clarté d’ une famine confirmée. Les agences humanitaires exposent les chiffres : sans accès sûr et durable, les calories n’atteignent pas les bouches. Les infirmières tiennent à jour les tableaux de malnutrition à la main en raison des pannes de courant ; les mères coupent soigneusement le pain en trois. Une trêve « temporaire » ne peut compenser les effets physiques de la famine. 

Au cours de ces vingt-quatre mois, les accords temporaires ont échoué, faute de convergence des objectifs. Israël a poursuivi ses objectifs militaires maximalistes sans voie possible pour un État palestinien souverain avec Jérusalem pour capitale. Le Hamas a conditionné une paix durable et les libérations à des mesures qu’Israël rejette. Les médiateurs ont divisé les propositions en phases, transformant chaque étape en un nouveau précipice, et les violations sont restées impunies.  

Au-delà du terrain de guerre, une autre bataille s’est déroulée. Le monde n’est pas resté silencieux ; les gens ont refusé se taire. De Rome et Londres à Barcelone et Lisbonne, les rues se sont remplies, semaine après semaine, de familles, de syndicalistes et d’étudiants portant des photos de leurs proches à Rafah et des listes de médicaments à envoyer si les points de passage rouvraient. 

En mer et sur les routes du désert, les convois et flottilles du Sumud mondial ont tenté de briser un blocus que de nombreux gouvernements ont normalisé. On peut débattre de la sagesse des stratégies de chacun, mais pas du message : les citoyens ordinaires ont tenté ce que les institutions ont refusé. Voilà à quoi ressemble le sumud – la résilience – en 2025. 

Illustration de la flottille Sumud, Gaza

La communauté internationale ne tient pas ses promesses

Pendant ce temps, au sein de l’ONU, la dissonance s’est accentuée. Les États membres ont élargi la participation de la Palestine et soutenu, à une écrasante majorité à l’Assemblée générale, la voie vers un État indépendant. Pourtant, le Conseil de sécurité n’a toujours pas protégé les civils. Ces scènes théâtrales ont alimenté le sentiment que le système ne pouvait tenir ses promesses les plus élémentaires.

Lorsque les caméras retournent sur les décombres, personne dans la file d’attente pour du pain ne demande quel a été le résultat des votes à New York. On se demande si l’aide sera acheminée aujourd’hui. Les histoires humaines transcendent les abstractions. Une enseignante de Deir Al-Balah explique que ses élèves mesurent le temps au nombre de leurs déplacements. Près d’Al-Shifa, une infirmière conserve une liste manuscrite de groupes sanguins scotchée dans une armoire métallique, le système étant hors service depuis des mois.

Un père actualise une conversation téléphonique à l’aube pour voir qui répond dans la nuit. Alors, que faudrait-il pour mettre fin à un génocide qui ronge chaque «trêve » ? Un plan axé sur les droits commencerait par définir les fins, et non seulement les moyens, et par aligner le courage public sur la politique officielle.  

La population de Gaza doit être au cœur de toute négociation

Le langage est aussi important que la logistique. Au cours de ces deux années, un vocabulaire a fait taire la violence : « dommages collatéraux », « frappe chirurgicale », « boucliers humains ». Chaque expression a transformé des personnes, avec leurs noms, leurs foyers et leurs espoirs, en problèmes à gérer. Le journalisme de défense des droits humains doit résister à cet effacement. Il doit aborder à la fois l’angoisse des familles de détenus israéliennes et la souffrance massive des Palestiniens, dont la terreur quotidienne reste moins visible aux yeux du public international.  

Gaza ne peut être gérée pour ramener “une paix” précaire. Elle doit être reconstruite et sa population doit retrouver sa place au cœur de toute négociation. Un cessez-le-feu digne de ce nom n’échangera pas ses droits contre les garanties d’autrui. Il insistera sur le fait que l’égalité n’est pas un luxe d’après-guerre, mais la condition de la paix, pour les Palestiniens comme pour les Israéliens. 

Deux ans après le 7 octobre, Gaza continue de résister ; seuls les dirigeants détournent encore le regard. La rue, elle, ne baisse pas les yeux 

Jenny Williams

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